Le dessin est une technique de représentation visuelle sur un support plat. Le terme « dessin » désigne à la fois l'action de dessiner, l'ouvrage graphique qui en résulte, et la forme d'un objet quelconque.
Le « dessin linéaire » représente les objets par leurs contours, leurs arêtes et quelques lignes caractéristiques ; au-delà de cette limite, le dessin se développe en représentant le volume par les ombres, souvent au moyen des hachures, incorpore des couleurs, et rejoint, sans transition nette, la peinture.
Le mot s'est écrit indifféremment « dessein » ou « dessin » jusqu'au xviie siècle, impliquant la notion d'intention, de projet, dans un travail de plus grande portée, en architecture, en peinture, en gravure.
L'essor de la production industrielle au xixe siècle a fait distinguer rigoureusement le dessin artistique et le dessin technique, une forme très codifiée de dessin linéaire qui vise plus à communiquer les informations précises nécessaires à la fabrication ou à l'utilisation d'un objet ou d'un bâtiment qu'à en donner une évocation visuelle. À partir du milieu du xxe siècle, design, un mot anglais qui réunit les deux sens de dessin ou dessein, désigne ce qu'un de ses promoteurs, Raymond Loewy, appellait esthétique industrielle.
Le sens du terme « dessin » évolue avec l'histoire des arts visuels. Le mot dessin est tiré de dessigner, avec l'influence de l'italien disegno signifiant représentation graphique (1444). Le terme italien signifiait à la fois la pratique, et le projet ou intention. Ce double sens a été conservé avec le mot français dessein. Ce n'est qu'au xviiie siècle, vers 1750, que dessin (sans e après ss) ne signifie plus que la représentation. Le terme anglais design, qui vient de l'italien designo et du français dessein, a conservé le sens de projet ou de conception. Il faut envisager les deux sens du mot, même si l'amateur peut s'intéresser aux dessins produits à titre de préparation d'un ouvrage aussi bien qu'à ceux valant pour eux-mêmes (Jacquet 2010).
Le dessin, comme projet d'un ouvrage, se trouve partout dès le Moyen Âge dans les arts plastiques, y compris l'orfèvrerie et la mode. Il résume et développe la pensée plastique de l'auteur, et lui permet de la présenter à ses clients ou commanditaires, sous une forme plus légère et demandant moins de temps que la réalisation définitive. Les dessins n'étaient pas en général destinés à être conservés ; cependant, selon Paul Valéry, « le souci de la personne et de l'instant l'emportant sur celui de l'œuvre en soi et de la durée, la condition d'achèvement a paru […] contraire à la « vérité », à la « sensibilité » et à la manifestation du « génie » […] l'esquisse a valu le tableau »2, et ce goût s'est aussi porté vers les projets, études et dessins préparatoires. Cette évolution commence en France à la fin du xviiie siècle. La première exposition des dessins du Cabinet du Roi a eu lieu au Louvre en 17973.
Le dessin comme art autonome, ne visant à rien d'autre que lui-même, naît des discussions dans le milieu des artistes et des amateurs sur les qualités plastiques et les principes gouvernant la peinture. La Querelle du coloris oppose au xviie siècle les partisans de la couleur à ceux du dessin. Le « dessin », dans ces discussions, ne dépend ni de la technique, ni du support. Il s'agit principalement de la ligne de contour des sujets, opposée à la surface colorée et à ses modulations, comme l'a fait Léonard de Vinci4. Les polémiques opposent ceux qui prennent exemple sur Poussin pour privilégier le dessin, allant jusqu'à considérer avec méfiance le raccourci, les recouvrements de personnages, les ombres fortes, à ceux qui, admirant Rubens, accordent plus de valeur à ceux qui savent nuancer, juxtaposer, organiser les couleurs, avec une touche visiblement variée. Ce sens restreint du « dessin », associé à la perspective linéaire, va se poursuivre jusqu'au xxe siècle. Les rapports entre dessin et peinture fluctuent. L'impressionnisme5 reproche en général au dessin le caractère intellectuel et contraignant que lui attribuent les courants picturaux qui l'ont précédé. Le cubisme renoue avec le dessin, sans l'obligation de présenter, par la perspective, un point de vue unique6.
Avec Flaxman commence une succession d'artistes qui ne présentent que le dessin linéaire. Au xixe siècle, les dessinateurs trouvent avec la lithographie et le dessin de presse des moyens de vivre de leur activité, sans nécessairement produire autre chose. Bien que les techniques de reproduction contraignent un peu leur style, ils peuvent aussi bien réaliser des peintures dessinées, rendant le clair-obscur par des hachures, que des purs dessins linéaires, comme l'ont fait Picasso, Matisse ou André Lhote.
Le dessin animé emploie depuis son invention dans les années 1920 des quantités de dessinateurs.
Dans la deuxième moitié du xxe siècle, la bande dessinée cesse de s'adresser spécifiquement aux enfants et le dessin narratif, nourri des techniques du dessin de presse, du cinéma, de la littérature, devient une des branches importantes de l'art du dessin.
Lorsque le projet graphique vise à la durée, choisissant son matériel à cet effet, on parle de peinture. L'acte de dessiner, sur pierre ou sur plâtre, sur bois, sur toile peut bien en être à la base : la peinture se définit, par opposition au dessin, comme devant durer.
Si pour Léonard de Vinci, le dessin du contour est une partie de la peinture4, pour Braquemond, quatre siècles plus tard, « le mot « dessin » résume tous les termes de la langue des arts plastiques (…) Les expressions : trait, modelé, couleur, ornement, forme, ligne, valeur, effet, etc. ne servent que pour aider par l'analyse à la signification du mot dessin »7.
Il n'y a pas de différence fondamentale entre le dessin et la peinture, si ce n'est que, d'après certains théoriciens de l'art, le dessin est monochrome dans son essence, la peinture colorée. Mais des dessins peuvent être en couleurs, soit directement dans le tracé, soit par coloriage dans un deuxième temps. Une peinture peut être linéaire et peut être monochrome comme c'est le cas des grisailles. La plupart des peintures, surtout lorsqu'elles sont figuratives, sont préalablement dessinées, ou dessinées en cours d'élaboration. On dessine aussi bien avec une brosse large qu'avec un crayon affûté, même si la matière est différente. On parlera donc de dessin lorsque les contours, les tracés, demeurent apparents, par rapport à des œuvres où dominent taches colorées, aplats de couleur.
Le dessinateur Alfred Kubin, traitant du dessin, non comme projet, mais « comme une fin en soi immédiate », écrit : « Cet art répond à une modeste impulsion. Il ne rivalise pas avec les phénomènes de la nature mais se contente d'en produire des signes. Il est symbolique8 ». C'est, pour lui, cette modestie qui distingue le dessinateur, qui l'amène à limiter son domaine d'exploration au papier et à l'encre de Chine, à la plume et au pinceau, qu'il étudie à fond. « Ma contemplation intérieure s'est éclaircie : ma vision s'est alors déplacée vers un assemblage de lignes aussi rigoureux qu'un système économique » (Kubin 2015, p. 37).
Les dessins ne sont pas conçus pour être conservés et exposés ; ces objectifs entraînent des procédés qui en entraveraient la légèreté et la spontanéité (Jacquet 2010). Ceci n'empêche que depuis la Renaissance, on a conservé comme des reliques précieuses les dessins et notes d'artistes vénérés comme Léonard de Vinci9. Pour les conservateurs, ce qui caractérise le dessin, c'est sa fragilité. L'exposition à l'air et à la lumière jaunit les papiers et décolore les encres ; la flamme le détruit instantanément, l'humidité y favorise la moisissure ; sali, le dessin est difficilement nettoyé ; les pigments poudreux des crayons, fusains, craies et sanguines passent d'une page sur l'autre ; le papier se plisse définitivement en cas de mauvaise manipulation (VTT, p. 1111sq). Les vernis dits fixatifs pénètrent le papier, et ne peuvent, s'ils ont jauni, être éliminés et remplacés.
La conservation des dessins sur papier implique en général un traitement biocide chimique ou par rayonnement ionisant (VTT, p. 1129-1130). Dans les collections des musées, les dessins sont conservés dans des locaux spécialement prévus, et ne sont présentés qu'occasionnellement, dans des salles à l'éclairage atténué. La mise en valeur du dessin inclut souvent un large passe-partout et une vitre de protection ; les originaux non montés se présentent sur un champ, dans une vitrine peu inclinée.
Les conservateurs doivent encore, pour organiser et valoriser les collections, identifier les auteurs. Les artistes n'ont souvent pas signé ce qu'ils considéraient comme des documents de travail. Les inscriptions peuvent être le fait de marchands ou de collectionneurs qui ont attribué à un maître ce qui est en fait une copie10.
Le dessin est généralement plus que le projet d'une gravure. Un maître comme Dürer pouvait dessiner sur le bois, et laisser à un de ses compagnons, anonyme, le soin de le creuser ; mais il avait tracé chacune des lignes de la gravure. Dans le cas où la gravure prenait pour sujet des tableaux célèbres, l'interprétation revenait au graveur, qui lui donnait parfois, bien que le dessin soit dans l'ensemble conforme à l'original, un caractère assez différent, comme Marcantonio Raimondi pour Raphaël.
L'eau-forte reproduit directement (inversés gauche-droite) les traits qu'un artiste a dessinés sur le support.
Au xixe siècle, la lithographie sur pierre grenée permet aux artistes de dessiner au crayon en vue de la reproduction. Cependant, la contrainte de l'inversion du sujet, qui sera reproduit la droite à gauche, l'interdiction de poser la main sur le support, car elle le marque, poussent la plupart à dessiner d'abord sur papier un projet, et certains artistes laisser à des spécialistes l'interprétation sur la pierre. La production de lithographies connaît une première spécialisation des dessinateurs ; la fabrication d'une lithographie des Voyages pittoresques et romantiques dans l'ancienne France peut faire appel à un dessinateur d'après nature, un lithographe pour le paysage, un pour les figures, un pour la lettre.
La photogravure affranchit le dessinateur de la plupart des difficultés techniques ; il lui suffit de connaître les limites propres à la technique d'impression pour laquelle il travaille. En dessin de presse et en bande dessinée, l'artiste produit en général un dessin linéaire « au trait », encre noire sur papier blanc ; la reproduction photographique élimine la mise en place au crayon et les repères posés en bleu. Les dessins originaux, avec toutes ces marques ou l'on sent « la main et le génie de l'auteur »11, sont devenues des pièces de collection.
La technique du dessin évolue avec les supports et les outils. Les hommes préhistoriques dessinent sur des parois, sur des roches, des os, en utilisant d’une part l’incision et d’autre part les pigments colorés appliqués au moyen d’outils rudimentaires. Le dessin plus proche des conceptions actuelles apparaît avec les supports tels que le papyrus, le parchemin, puis le papier, et les outils de traçage comme le calame (roseau), la plume d’oiseau taillée. En Orient prédomine le pinceau. Les Romains utilisent les pointes de métal, ancêtres de la mine de crayon moderne sur un support préparé, enduit d'un mélange, généralement constitué de pigments, de blanc d’Espagne, de gomme arabique et de poudre d’os.
À la fin du xixe siècle, Jules Adeline définit le dessin comme représentation des objets à l'aide de traits de plume ou de crayon, parmi lesquels se distinguent les dessins aux deux et aux trois crayons, qui sont la pierre noire, la craie blanche et la sanguine12, mais aussi le fusain13. On distingue aussi les instruments annexes du dessin, règles et compas dont on se passe dans le dessin à main levée.
Le dessin profite aujourd'hui de matériel et de logiciel informatiques qui, l'affranchissant de la réalisation matérielle, permettent des tracés lissés et des possibilités de correction infinies — si toutefois c'est le but de l'artiste.
Le support est le plus souvent du papier, mais peut être toute autre matière. Le dessin au tableau noir a, plus encore que les autres, vocation à l'impermanence14. On dessine soit sur des feuilles libres, soit sur des carnets ou cahiers, au crayon ou au fusain pour les techniques sèches, tandis que les techniques humides y déposent de l'encre à la plume ou au pinceau.
Tout ce qui est susceptible de laisser une trace peut servir d'outil, à commencer par les doigts. Les craies, les fusains, les crayons, les plumes, les pinceaux, les stylographes (à bille, à plume, tubulaires), les feutres déposent de la matière sur le support ; les pointes, burins ou canifs en enlèvent, pour le dessin gravé ou le graffiti. Depuis la fin du xxe siècle, on dessine sur ordinateur.
Selon une conception classique, dessiner consiste essentiellement à délimiter par des traits les contours de l'objet à représenter. C'est une des différences essentielles que Heinrich Wölfflin distingue dans ses Principes fondamentaux de l'histoire de l'art entre le graphique (dessin) et le pictural (peinture).
Ceci implique une démarche d'interprétation et de synthèse : passer d'un objet en volume à un dessin plat nécessite un choix de représentation. Soit l'articulation des éléments graphiques peut éviter la perspective, soit celle-ci peut être empirique et spontanée, soit celle-ci obéit à un système de placement des lignes : perspective cavalière, perspective « italienne » conforme à une vision basée sur la projection, comme si le dessin était une fenêtre sur l'objet représenté ainsi que l'écrivit Alberti. L'application des règles de la perspective à des figures humaines ou animales s'appelle le raccourci (VTT, p. 66).
Perspective empirique :
Jean Fouquet,
Arrivée des croisés à Constantinople16.
Le dessin peut obéir à des notions qui ne tiennent pas compte des lois géométriques de l'optique ou qui ne les considèrent pas comme primordiales. Représenter une montagne plus petite qu'un personnage peut paraître illogique, bien que la perspective puisse l'exiger. Les personnages sont quelquefois représentés à proportion de leur importance dans la société. Les conventions des différentes civilisations tentent de concilier les aspects qu'on considère primordiaux. Quand les traits caractéristiques du sujet priment, on parle — surtout en égyptologie — d'aspectivité. Le dessin obéit à des conventions et des codes : pour les Égyptiens, un œil est représenté de face, mais un visage de profil, un torse de face et les jambes de profil. Jean Fouquet dessine l’Arrivée des croisés à Constantinople vue par un spectateur central : à gauche les cavaliers de face, au centre de profil, et à droite de dos, comme si le spectateur tournait la tête, la route étant droite. Plus près de nous, l'apparition de la photographie a permis de représenter exactement un instant de la course d'un cheval au galop ; toutes les représentations passées étaient « fausses » anatomiquement, mais restent expressives.
Le dessin peut reporter les contours de manière précise et fidèle (considérant qu'il est vu par un système optique tel que la chambre claire ou l'appareil photographique), ou le trait peut subir des déformations et des distorsions qui vont accentuer certains caractères du modèle, possiblement jusqu'à la caricature, ou exprimer simplement les goûts et la sensibilité du dessinateur.
La représentation du volume se fait généralement par le raccourci, renforcé par les modulations de la lumière et les ombres. Ces modulations de luminosité, qu'on appelle valeur dans le contexte du dessin et de la peinture, s'obtiennent par traits successifs formant hachures, par remplissage avec variation de la pression selon l'intensité souhaitée, estompage en frottant à la main ou avec un outil, gommage pour éclaircir, etc. ; certaines techniques étant adoptées par certains et réprouvées par d'autres.
Étude, par un membre de la famille Lines,
xixe siècle.
La rapidité d'exécution caractérise le croquis, dessiné face au sujet. Les esquisses sont les premières idées pour un travail important. Les études, généralement plus élaborées, servent à l'apprentissage général ou à celui d'un élément difficile d'un projet.
Le croquis doit saisir l’essentiel sans s’attarder sur les détails. Il sert de notation et d’exercice. Sa rapidité d’exécution fait du « geste » graphique un élément important de son caractère.
Croquis et esquisses servent dans tous les types de dessin.
Le dessin d'art utilise toutes les techniques graphiques possibles dans une démarche ou une intention artistiques et à destination du marché de l'art.
Le dessin technique s'est détaché du dessin artistique pendant l'essor de l'industrie, vers la fin du xixe siècle.
Le dessin technique, ou dessin industriel, est une discipline transversale fondement de la communication technique, de la conception et de l'analyse systémique. Il est utilisé principalement en génie mécanique (bureau d'études, bureau des méthodes) et en génie civil (architecture).
Le dessin industriel conserve le sens d'origine du mot dessin : il est l'expression d'un projet, « pour communiquer sans aucune ambiguïté, notamment entre le concepteur (le Bureau d'Etude) et le fabricant (l'atelier)17 ». Quand le dessinateur conçoit l'apparence du projet, il s'appelle designer. Le français naturalisé américain Raymond Loewy a lancé cette activité comme profession indépendante des fabricants sous le nom d'industrial design, traduit encore en 1953 par dessin industriel ; il proposait qu'on l'appelle en français esthétique industrielle18.
Victor Baltard,
Église Saint-Augustin à Paris, élévation de la façade principale (1868-1871)
19.
Le dessin est à la base du métier d’architecte, même si l’utilisation de l’outil informatique réduit l'importance des habiletés manuelles. C’est en dessinant, d’abord sous forme d’esquisse et de croquis, puis de dessins plus élaborés, que l’architecte trouve et précise son projet. Cette étape préliminaire de dessin à main levée est à peu près universellement pratiquée. L’étape suivante consiste à disposer les éléments indépendants de l'aspect visuel, comme les conduites de fluide, et effectuer les calculs de résistance des matériaux. On revient ensuite au dessin pour tracer les plans nécessaires aux constructeurs. Cette étape est maintenant effectuée par dessin assisté par ordinateur avec les logiciels propres à l’architecture. Elle se faisait au moyen des outils du dessin technique, le crayon ou le portemine à mine dure, la règle, l’équerre, le té, sur une table à dessin, puis un passage à l'encre au tire-ligne et plus tard au stylo technique.
L'architecte fournit aussi au commanditaire des plans de façades et des vues en perspective réalistes, en couleurs, avec des ombres qui indiquent le relief, et les éléments de décor qui vont donner vie à l’ensemble : plantes, personnages, véhicules, etc. L’architecte devait donc avoir une connaissance poussée de la perspective, rigoureusement construite. Selon le degré de précision de ces dessins, les accessoires pouvaient être traités d’une manière simplifiée, afin de ne pas prendre le pas sur l’essentiel, l’architecture. Chaque architecte pouvait avoir sa façon personnelle de traiter arbres, véhicules et personnages (dénommés grouillots dans le jargon des architectes). Les architectes ont dessiné de véritables œuvres d’art, souvent mises en couleurs à l’aquarelle. De nos jours, les logiciels 3D dispensent de la partie technique de ce travail, tandis que des illustrateurs spécialisés réalisent d’après les plans ou perspectives fournis par les architectes des dessins de présentation pour des projets non encore construits, pour la publicité et l'information des acheteurs potentiels.
Le dessin sert au sculpteur pour effectuer ses recherches. Il n’est pas une fin en soi, mais une étape de son travail, pour lui permettre de visualiser ses projets en vue d’une réalisation en volume, dont le rendu est donc prépondérant, par des zones ombrées avec ou sans dégradés, et l’absence ou la neutralité du fond21. Tous les dessins de sculpteurs ne sont pas des chefs-d’œuvre du strict point de vue de la qualité du dessin, mais ils sont les témoins du travail de leur auteur, et certains sont des œuvres d’art à part entière.
Le dessin dit de mode est employé dans tous les domaines de la création, des vêtements aux accessoires : chaussures, chapeaux, sacs, bijoux. Le dessin sert à préciser l’idée générale puis à l’affiner au niveau de la conception, avant de passer à la réalisation proprement dite. Le dessin de mode requiert une connaissance minimale de l’anatomie basée sur le squelette, qui détermine les positions et postures du corps, et parfois sur un traitement particulier des matières (textiles et autres). Un autre aspect du dessin de mode est la représentation des modèles selon le style propre au dessinateur, sans qu’il en soit lui-même le créateur, ce qui peut être alors une des formes du dessin de presse.
Le dessin est aussi à la base des créations de motifs pour les tissus, imprimés ou jacquards.
Le dessin de presse, et souvent la caricature, ont pour destination la reproduction imprimée. On n'attend du spectateur qu'un bref moment d'attention. Le dessin de presse professe la simplification et l'exagération, et dépend le plus souvent de codes graphiques locaux.
La bande dessinée combine l'art de raconter des histoires à celui de les représenter par le dessin. Souvent un scénariste s'associe avec un dessinateur. Une maison d'édition de bande dessinée peut aussi confier le dessin et le scénario à plusieurs artistes. Dans ce cas, les dessinateurs respectent un style graphique, et les scénaristes le caractère des histoires et de leurs personnages23. Une série peut ainsi durer, comme celle des Pieds Nickelés, pendant plusieurs générations24.
À partir du dernier tiers du xxe siècle, aussi bien en Europe (Duc 1981) qu'au Japon où le manga est très populaire25, les dessinateurs de bande dessinée ont cherché à produire un style graphique personnel et caractéristique, qui contraste avec l'effacement de l'artiste pour la production d'un style défini par les éditeurs, fréquent auparavant.
Le dessin animé consiste à reproduire le mouvement en faisant se succéder des images représentant chacune un instant successif d'une action, comme au cinéma, à la différence que ces images sont dessinées26.
Le dessin animé est un processus très long et industriel, qui implique le plus souvent de nombreux graphistes spécialisés. Certains définissent les personnages et leurs mouvements par des esquisses au crayons, mis au propre avec la qualité de superposition nécessaire par des traceurs-gouacheurs27 sur des feuilles transparentes. D'autres se consacrent au dessin des décors.
Le dessin animé recourt souvent, au xxie siècle, aux techniques de dessin assisté par ordinateur.
Le dessin est souvent l'une des activités spontanées de l'enfant. Le développement de ses capacités graphiques suit un schéma régulier qui passe du gribouillage, pendant lequel l'enfant fait l'expérience du matériel, au symbolisme, pendant lequel il représente les sujets par des traits caractéristiques. L'enfant poursuit en général son exploration en direction du dessin d'observation. Jean Piaget a notamment observé et décrit cette séquence reliée au développement cognitif général et à constitution de l'individu. Les pédagogues observent les produits de l'activité de dessin en tant que témoin de cette évolution.
Dès le stade du symbolisme, le dessin permet à l'enfant de s'exprimer. Quand il parle suffisamment bien pour communiquer avec son entourage, le dessin lui permet d'extérioriser ce qu'il ne peut exprimer verbalement. Les psychologues recherchent de ce fait souvent dans les dessins d'enfant des indices des sentiments des enfants.
Le fusain, tige de charbon de bois, est l'un des instruments de dessin les plus anciens. Il est largement utilisé dans la réalisation de croquis et d'études (Béguin1995, p. 252).
Plus que le crayon, la pierre noire ou la sanguine, le fusain se prête aux aplats et au rendu du modelé28. Le trait varie en largeur et en noirceur, il se brouille au doigt ou au chiffon, s'allège ou se corrige à la mie de pain. Il se reporte sur la feuille voisine s'il la touche. Il a l'inconvénient d'être fragile, à moins d’utiliser un fixatif appliqué généralement avec un pulvérisateur.
En dessin, le « crayon » désigne tout instrument marquant à sec qui se présente sous forme d'un bâton. On parle ainsi de « crayon à bille » (Béguin1995, p. 184).
Le crayon à mine de graphite (autrefois mine de plomb) offre une gamme de possibilités très étendue, selon le type de mine, son affûtage, le grain du papier et les techniques possibles, du contour simple aux nuances de dégradés obtenues par des hachures, frottages, estompages. Le trait peut être allégé ou corrigé à la gomme à effacer, bien que le gommage affecte le papier, et les traits suivants sur la partie modifiée. Cependant, il est difficile d'en obtenir des forts contrastes. Des artistes ont complété le dessin au crayon en marquant le trait fort à la plume.
Dans la bande dessinée, le dessin au crayon, dit crayonné, est, dans la production sans ordinateur, la première étape de la production d'une planche. L'artiste, ou parfois un assistant, termine ensuite le dessin pour qu'il soit prêt pour une reproduction au trait, à l’encre avec une plume ou un pinceau : une fois l’encrage sec, le dessin préliminaire au crayon peut être effacé29.
Le trait de crayon dépend, pour une dureté donnée, de la force d'appui sur la mine. Le dessinateur peut utiliser des crayons graphite de plusieurs duretés dans un même dessin.
Le dessin d'académie et le portrait se font fréquemment aux trois crayons. Si la craie et la sanguine s'atténuent et s'effacent à la gomme mie de pain, le trait de pierre noire est définitif.
Le crayon de couleur permet tous les intermédiaires entre le dessin linéaire et la peinture ; certains sont « aquarellables », permettant de combiner le dessin au trait à une technique proche de l'aquarelle30.
Dessin au stylo à bille couleur.
Le stylo à bille, diffusé à partir de 1950, et autorisé dans les écoles en France en 1965, y sert souvent aux élèves pour dessiner dans les marges des cahiers. Il peut également être un véritable outil d'art31. De la simple esquisse pour capturer un mouvement jusqu’à l’illustration précise et au dessin d’architecture, le stylo à bille s'adapte à tous les genres.
Dans le dessin artistique, le stylo à bille se distingue par le fait qu'il ne s'efface pas ; le trait est à peu de chose près uniforme, et plutôt léger. Le trait fort s'obtient en repassant plusieurs fois.
La plume est un instrument de dessin autant que d'écriture au moins depuis la Renaissance. Elle produit un trait fin ou gras selon la pression exercée. Les traits de plume tracés à l'encre indélébile se combinent aussi avec le lavis et l'aquarelle, qui ne les perturbent pas32.
Elle sert autant pour le croquis de terrain, pour lequel elle a l'avantage de produire un dessin rapide et contrasté, solide dès que l'encre a séché, que pour les projets élaborés, dans lesquels les hachures peuvent indiquer les valeurs. Sur un dessin ou un croquis au crayon, la plume peut marquer le trait fort ; on efface parfois le crayon pour ne conserver que cette décision finale.
La plume a été l'instrument principal de l'encrage en bande dessinée jusque dans les années 1970.
Le pinceau est l’outil de base du dessin en Extrême-Orient, mais il est largement utilisé également en Occident. Sa souplesse permet au dessinateur d'effectuer des déliés très fins et des aplats impossibles à reproduire avec d'autres techniques comme la plume.
Le pinceau est souvent l'outil de prédilection pour l'encrage en bande dessinée. Il est très utilisé par des artistes de styles très différents, comme André Franquin, connu pour son trait expressif et nerveux, ou Milton Caniff qui jouait sur les contrastes du noir et du blanc.
Les stylos-feutres, marqueurs ou markers, existent en de nombreuses couleurs et épaisseurs de trait. Des gammes professionnelles permettent de créer ses propres nuances à partir d’encres liquides et de solvants divers. Ils ont trouvé une application spécifique dans le layout ou rough utilisé en publicité pour réaliser des simulations de photographies à réaliser ultérieurement. On utilise un papier spécial, sans grain et semi-transparent, qui ne diffuse pas les solvants et permet de travailler par transparence. Les spécialistes, ou « roughmen », peuvent atteindre des résultats de qualité picturale.
Le matériel informatique fournit aux dessinateurs des outils pour un dessin qui n'aura quelquefois aucune autre existence que numérique. L'ordinateur sert largement pour la conception assistée par ordinateur et le dessin technique. Les fabricants de matériel informatique ont progressivement produit des périphériques mieux adaptés que la souris au dessin d'illustration, pour lequel le regard et la main ont plus d'importance que les abstractions du dessin industriel.
On peut dessiner à l'aide d'un stylet sur la tablette graphique ; cela implique d'apprendre à regarder l'écran de l'ordinateur alors que sur la surface sur laquelle on pose le stylet est ailleurs. L'écran tactile résout cette difficulté. Des capteurs transmettent à l'ordinateur ou à la tablette tactile la position du stylet, son inclinaison, la force d'appui, etc. Un logiciel éditeur d'image matricielle ou d'image vectorielle transforme ces données en « vecteurs » générateurs de graphisme avec des paramètres que regroupent des « outils » nommés par analogie à ceux du dessin et de la peinture.
Les pastels sont des petits bâtons de pigments servant à colorier sur des papiers, on les utilise le plus souvent en arts graphiques. Il existe différents types de pastels, gras ou à l'eau. Les pastels d'initiation scolaire s'achètent généralement en set.
Le dessin est soumis, comme les autres œuvres de l'esprit, aux règles de la propriété intellectuelle.
En France, il doit aussi obéir, s'il est publié et représente une personne, aux règles du droit à l'image33. La caricature « constitue une tolérance traditionnellement admise à l'égard de ceux dont la profession ou l'activité permet de supposer de leur part une autorisation tacite »34, mais cette exception au droit à l'image n'est pas toujours reconnue (Pierrat 2002, p. 115-119).
En droit des affaires, le mot « dessin » ne désigne pas un objet matériel, mais la forme, reconnaissable par le consommateur, d'un objet (design).
En droit français qui transpose une directive communautaire du 13 octobre 1998 relative à la protection des dessins et modèles : « […] tout dessin nouveau, toute forme plastique nouvelle, tout objet industriel qui se différencie de ses similaires, soit par une configuration distincte et reconnaissable lui conférant un caractère de nouveauté, soit par un ou plusieurs effets extérieurs lui donnant une physionomie propre et nouvelle35 ».
Il profite alors d'une protection d'une durée maximale de 25 ans par période de 5 ans sous réserve qu'il « est nouveau et présente un caractère propre »36.
Une protection communautaire existe également au profit de tout dessin original. Un règlement communautaire de 2001 confère une protection opposable à l'échelle de l'Union européenne. Pour les dessins enregistrés à l'Office de l'Union européenne de la propriété intellectuelle (EUIPO), la protection est dans le temps la même qu'en France (de 5 à 25 ans). Pour le dessin (ou modèle) non enregistré, cette protection naît de la première divulgation pour une durée de trois ans.
Il existe enfin à l'échelle internationale une protection qui est opposable à compter de l'enregistrement international des dessins et modèles industriels à l'Office mondial de la Propriété intellectuelle37.
- André Béguin, Dictionnaire technique du dessin, 2,
- André Béguin, Dictionnaire technique de la peinture,
- Ségolène Bergeon-Langle et Pierre Curie, Peinture et dessin, Vocabulaire typologique et technique, Paris, Editions du patrimoine, , 1249 p. (ISBN 978-2-7577-0065-5)
- Fernand Jacquet, « Dessin », dans Anne Souriau, Vocabulaire d'esthétique, par Étienne Souriau (1892-1979), Paris, PUF, coll. « Quadrige », , 3e éd. (1re éd. 1990) (ISBN 9782130573692), p. 595-597
- Pascal Vallet, Les dessinateurs : un regard ethnographique sur le travail dans les ateliers de nu, Paris, L'Harmattan, , 192 p. (ISBN 978-2-343-00594-2, lire en ligne [archive])
Sur les autres projets Wikimedia :
- ↑ Gallerie dell'Accademia de Venise.
- ↑ Paul Valéry, Degas, danse, dessin, Gallimard, coll. « Folio », (1re éd. 1938), p. 50.
- ↑ « Archives du Cabinet des dessins -dessins, pastels, émaux peints » [archive].
- ↑ Revenir plus haut en :a et b Léonard de Vinci, Traité élémentaire de la peinture (lire sur Wikisource), Chap. 47, Division de la peinture. En italien, le texte porte figura et non disegno « Dividersi la pittura in due parti principali, delle quali la prima è figura, cioè la linea che distigue la figura de' corpi, e loro particole ; la seconda, é il colore contenuto da essi termini » édition de 1651 [archive].
- ↑ Sauf Degas et quelques autres (Valéry 1965).
- ↑ André Lhote, Traités du paysage et de la figure, Paris, Grasset, (1re éd. 1939, 1950).
- ↑ Félix Bracquemond lien auteur1=Félix Bracquemond, Du dessin et de la couleur, Paris, Charpentier, (lire en ligne [archive]), p. 23-24. Charles Blanc, Grammaire des arts du dessin : architecture, sculpture, peinture, jardins : gravure... eau-forte... camaïeu... lithographie..., Paris, 3, (1re éd. 1867) (lire en ligne [archive]), p. 21 sq. avait défendu longuement la même idée.
- ↑ Alfred Kubin, Le travail du dessinateur, Paris, Allia, , p. 33-34 « Le dessinateur ». Texte publié en 1924.
- ↑ Jean Guiffrey et Pierre Marcel, Inventaire général des dessins du Musée du Louvre et du Musée de Versailles, t. 1, Paris, (lire en ligne [archive]), v.
- ↑ « Dessins de la Renaissance : un art méconnu » [archive], sur expositions.bnf.fr.
- ↑ Eugène Véron, L'esthétique : Origine des arts, le goût et le génie, définition de l'art et de l'esthétique, Paris, (lire en ligne [archive]), p. 63
- ↑ Jules Adeline, Lexique des termes d'art : nouvelle édition, (1re éd. 1884) (lire en ligne [archive]), p. 147-149 « Dessin ».
- ↑ Adeline 1900, p. 215.
- ↑ « C'est là que j'enseigne à mes étudiants le dessin sur modèle vivant, dit le professeur Philippe Comar. Des modèles […] posent […] devant une vingtaine d'élèves qui dessinent sur le tableau noir. Ces dessins d'étude ne sont pas conservés, même quand ils sont très bons et que l'élève a travaillé dessus pendant deux heures ! On les efface avec une éponge et on recommence ! », « Suivez le guide … à l'école des Beaux-Arts de Paris », Léonard, musée du Louvre, no 187, , p. 26—29.
- ↑ Birmingham, Barber Institute of Fine Arts.
- ↑ Paris, BnF.
- ↑ « Le dessin industriel » [archive] (consulté le ).
- ↑ Raymond Loewy (trad. de l'anglais par Miriam Cendrars), La laideur se vend mal [« Never leave well enough alone »], Gallimard, coll. « Tel » (no 165), (1re éd. 1952) (ISBN 978-2-07-072013-2).
- ↑ Plume et encre, rehauts d'aquarelle et d'or. Paris, musée d'Orsay.
- ↑ Paris, musée d'Orsay.
- ↑ Renan Calvo Chaves, Le dessin de sculpteur : Thèse de doctorat en histoire de l'art. Université Rennes 2, (lire en ligne [archive]) ⟨NNT : 2019REN20001⟩.
- ↑ Paris, Bnf.
- ↑ Bernard Duc, L'Art de la B.D. (bande dessinée), t. 1 : du scénario à la réalisation, Grenoble, Glénat, coll. « Art et technique », (ISBN 978-2-7234-0252-1).
- ↑ « L'histoire des pieds nickelés » [archive], sur matthieu.chevrier.free.fr (consulté le ).
- ↑ Jean-Marie Buissou, Manga : Histoire et univers de la BD japonaise, Arles, Philippe Picquier, , 414 p. (ISBN 978-2-8097-0197-5).
- ↑ Trésor de la langue française.
- ↑ Fiche métier ROME 32212.
- ↑ Maxime Lalanne, Le fusain, Paris, Berville, , 30 p., p. 10.
- ↑ Thierry Groensteen, « Brouillons et crayonnés : leçons de méthode à travers les collections du musée », Neuvième Art, no 7, , p. 70-71.
- ↑ Cette technique est relativement récente, le crayon aquarellable ayant été inventé en 1931.
- ↑ Matt Rota et Marie-Christine Guyon (contribution), L'art du stylo à bille : Découverte, expérimentation et technique, Paris, Eyrolles, .
- ↑ Kubin 2015, p. 68-75 « Le dessin à la plume ». Texte de 1927.
- ↑ Emmanuel Pierrat, Reproduction interdite?, Laurent du Mesnil, , p. 32.
- ↑ Cour d'Appel de Versailles, 1991, cité par Pierrat 2002, p. 114.
- ↑ Cf. L. 511-3 Code de la Propriété Intellectuelle ou CPI.
- ↑ art. L. 511-2 CPI
- ↑ OMPI [archive].
- Portail de la peinture
- Portail des arts
-
Le dessin technique - dit aussi dessin industriel - est un langage graphique figuratif pour la représentation graphique, la communication technique, la conception et l'analyse systémique de produits mécaniques, électroniques ou mécatroniques.
Il est utilisé principalement en génie mécanique, mécanique industrielle, génie électrique, (bureau d'études, bureau des méthodes), en génie civil (architecture) ainsi qu'en électronique pour la représentation des différentes composantes et de leur structure.
Il s'agit d'un ensemble de conventions normalisées pour représenter des objets (produits) et constructions (structures, édifices); ces conventions assurent que le produit ou la construction représentée est tel qu'imaginé par le concepteur.
Différents types de dessins techniques existent :
- le dessin préliminaire :
-
le dessin technique détaillé :
- le livrable de Génie Civil :
- l'avant projet sommaire (APS),
- l'avant projet détaillé (APD),
- le plan d'installation générale,
- le dessin d'architecture
- le Tel Que Construit (TQC).
Les logiciels de Dessin assisté par ordinateur (DAO), de Conception assistée par ordinateur (CAO) et plus particulièrement de Conception et fabrication assistées par ordinateur (CFAO) impliquent des outils de calcul puissants pour la modélisation de produits et pilotage de machines-outils pour leur fabrication, mais également la modélisation d'édifices architecturés ou d'installations industrielles. Ils permettent une édition cohérente et précise des dessins techniques (plans) pour la bonne réalisation des projets. Cependant, la cotation fonctionnelle des dessins techniques est toujours à vérifier. L'opérateur (le dessinateur industriel, le projeteur) doit être en mesure de concevoir dans les règles de l'art, d'interpréter et corriger les données d'entrée et de sortie le cas échéant.
Le dessin technique nécessite une connaissance aiguë des conventions normalisées suivant le lieu et le secteur et d'activité, la nature des produits à élaborer, la sécurité et l'environnement des constructions à concevoir. Il peut également contribuer aux analyses de faisabilités, aux analyses de risques et de défaillances, mais aussi à la détermination des coûts de production ou de construction.
Il est un des modes de communication entre le concepteur et le fabricant (constructeur), ce qui en l'espèce, laisse peu de place à l'erreur et doit donc toujours faire l'objet d'un contrôle préalable par une tierce personne, avant d'être validé et exploité "bon pour exécution". Le dessinateur en est l'interprète privilégié sous la responsabilité d'un ingénieur ou d'un architecte.
Dessin d'ensemble, en bas à droite le cartouche et la
nomenclature.
Dessin de Léonard de Vinci
Le dessin technique répond à deux besoins essentiels du processus de conception technique : formaliser les idées pour valider des concepts, et communiquer. La représentation par le dessin ne doit donc pas se limiter à une simple description de formes.
Même si la perspective constitue un modèle général suffisant pour donner un ordre d'idée, c'est un vecteur peu efficace de données géométriques. De plus, elle peut contribuer à de mauvaises interprétations (voir les travaux de Maurits Cornelis Escher qui a su jouer de cette insuffisance). En effet la projection sur une feuille en deux dimensions d'un objet à trois dimensions n'est pas une transformation bijective. Il n'est pas possible, sur une perspective de relever systématiquement la valeur d'un angle : aucun angle n'est droit sur un cube représenté en perspective, et parfois deux angles droits apparaissent avec des valeurs différentes.
L'idée forte du dessin technique est la suppression arbitraire d'une dimension, ce qui permet de faire apparaître en vraie grandeur les deux autres. Du coup, au moins deux vues différentes seront nécessaires pour prétendre tenir l'ensemble des caractéristiques géométriques de l'objet représenté.
La perspective cavalière s'inscrit en quelque sorte à mi-chemin entre la perspective naturelle (conique) et la projection plane (comme la perspective isométrique).
Les schémas électriques, ou de circuits hydrauliques font partie des dessins techniques. Dans ce cas, le souci est de représenter l'organisation des composants techniques. De même les organigrammes peuvent être apparentés au dessin technique.
Il s'agit d'un langage de description dont on possède des exemples anciens pour le bâtiment depuis les carnets de Villard de Honnecourt jusqu'aux cours de Girard Desargues et de Jacques Aleaume. Sa forme contemporaine, selon les principes de la géométrie projective ou descriptive, a été définie au début du xixe siècle par Gaspard Monge.
Le dessin technique doit être compris par tous. Pour cela, il doit y avoir quelques règles de présentation conventionnelles qui font l'objet de normes officielles, en France par l'AFNOR (voir Liste de normes NF), au Canada par l'ACNOR et en Suisse les normes VSM (éditées par le bureau des normes suisse des constructeurs de machines).
Vues d'une clarinette en correspondance. Montage photographique.
Conventions de placement européenne et américaine indispensables dans le cartouche
L'objet est souvent représenté selon plusieurs vues dont la disposition relative respecte certaines conventions. Tout objet technique présente des directions principales évidentes. En découlent six directions de vue particulières : de face, d'arrière, de dessus, de dessous, de gauche, de droite. Ce principe de projection s'appuie sur les techniques de la géométrie descriptive.
On peut utiliser deux conventions pour placer les vues en correspondance, toutes deux ayant la vue de face comme référence :
- la convention européenne (ou projection européenne) : la vue de dessus est placée sous la vue de face, la vue de droite, à gauche de la vue de face... Ce qui revient, entre deux vues, à faire « rouler » la pièce au-dessus du plan sur lequel elle est censée être posée.
- la convention américaine (ou projection américaine) : on place la vue de dessus au-dessus de la vue de face, la vue de gauche à sa gauche… Ce qui revient à faire rouler la pièce en dessous du plan.
La convention utilisée est représentée par un cône tronqué ainsi que sa projection placé dans le cartouche.
Les deux représentations se justifient ainsi :
- la convention européenne correspond à la logique des projections : ce qui est vu « de droite » (depuis la droite) se projette à gauche, et donc se dessine à gauche, etc.
- La convention américaine privilégie l'aspect pratique : les détails à gauche dans la vue de face voisinent avec leurs représentations dans la vue de gauche (cela permet la proximité des cotations).
Chaque vue ne peut représenter l'objet que suivant deux dimensions. Deux vues adjacentes en correspondance ont donc une direction principale en commun. Dans cette direction un même détail est représenté en vis-à-vis : par exemple le bas de la pièce doit être à la même hauteur sur les vues de face et de droite. La hauteur de la pièce peut indifféremment être relevée dans les deux vues.
Dans un souci de clarté, on lui associera quelques vues supplémentaires (souvent une ou deux) pour effacer toute ambiguïté. Par exemple :
- une pièce de révolution peut être entièrement définie dans une vue axiale. En effet sa symétrie de révolution lui confère une géométrie à deux dimensions identiques.
- une pièce parallélépipédique sans trop de trous sera complètement définie sous deux vues.
- pour une automobile, la vue de face est… la vue de côté, qui définit le mieux la ligne.
Selon la convention européenne, on aura donc, en règle générale, sur une feuille A4 placée verticalement, la vue de face dans la partie supérieure gauche de la feuille, la vue de dessus sous la vue de face, et la vue de gauche dans la partie supérieure droite de la feuille, laissant la partie inférieure droite pour le cartouche et les textes. Les vues de gauche et de dessus sont alignées sur la vue de face, mais on ne laisse pas subsister les lignes de rappel.
Enfin il faut privilégier les vues en coupe pour la définition des formes cachées, les traits forts étant plus facile à interpréter, et les hachures localisant mieux les pleins de matière.
Conformément aux normes, l'objet de conception dans le dessin peut être réalisé en taille réelle, réduit ou agrandi. Le rapport des dimensions linéaires d'un objet dans le dessin à leur taille réelle est appelé une échelle. En Russie, il s'agit du GOST 2.302-68 Unified System for Design Documentation (ESKD). L'échelle [10] Selon ce GOST, les échelles suivantes doivent être utilisées dans la conception :
Échelles de réduction 1: 2; 1 : 2,5 ; 1 : 4 ; 1 : 5 ; 1:10 ; 1:15 ; 1:20 ; 1:25 ; 1:40 ; 1:50 ; 1:75 ; 1100; 1 : 200 ; 1 : 400 ; 1 : 500 ; 1 : 800 ; 1 : 1000
Valeur naturelle 1 : 1
Échelle de grossissement 2 : 1 ; 2,5 : 1 ; 4 : 1 ; 5 : 1 ; 10 : 1 ; 20 : 1 ; 40 : 1 ; 50 : 1 ; 100 : 1.
Lors de la conception de plans directeurs pour de grands objets, il est permis d'utiliser une échelle de 1: 2000; 1 : 5000 ; 1 : 10000 ; 1 : 20 000 ; 1 : 25000 ; 1 : 50 000.
Lire la suite dans le texte de la norme.
L'utilisation des différents traits suit la norme NF E 04-520 ISO 128. On utilise globalement trois épaisseurs de trait : fort (ou épais, ou gras) ép. 0.5 à 0,7 mm, fin ép. 0.25 à 0,35 mm et très fin ép. 0.15 à 0,2 mm. Le trait peut être plein (ou continu), interrompu (ou discontinu : petit traits de même longueur) ou mixte (en alternance, trait long, trait court). Ce procédé permet de contraster le dessin, d'en distinguer les géométries visibles de celles qui sont cachées, de matérialiser les axes de constructions et d'usinages, d'indiquer les coupes.
En mécanique, les traits forts et continus (ép. 0.5 à 0,7 mm) définissent les géométries visibles, les traits fins et discontinus (ép. 0.25 à 0,35 mm) définissent les géométries cachées, les traits mixtes très fins (ép. 0.15 à 0,2 mm) définissent les axes. En installation générale industrielle, les traits fins et continus (0.35 à 0,5 mm) définissent les géométries visibles, les traits fins et discontinus (ép. 0,20 mm) définissent les géométries cachées, les traits mixtes très fins (ép. 0.15) définissent les axes.
En règle générale les épaisseurs sont à gérer en fonction de l'échelle du dessin afin de ne pas en surcharger la lecture.
Pliage normalisé des plans. Les plis sont indiqués en pointillés, le premier pli est en noir. Le cartouche est le rectangle gris en bas à droite des feuilles.
Pour les formats A1 et A3, seules les feuilles positionnées à l'horizontale sont autorisées. La marge est de 10 mm sauf celle de gauche qui doit être de 20 mm.
La feuille comprend en général plusieurs vues réparties de manière équilibrée.
Pour le rangement, la feuille est pliée de sorte que :
- elle puisse tenir dans une pochette prévue pour le format A4 ;
- le cartouche se trouve toujours au même endroit.
Le cartouche étant toujours visible, il est ainsi aisé d'identifier rapidement le document sans avoir à le déplier.
En Europe, on utilise les formats de la norme ISO 216 :
- format ISO A4 = 297 × 210 mm
- format ISO A3 = 420 × 297 mm
- format ISO A2 = 594 × 420 mm
- format ISO A1 = 841 × 594 mm
- format ISO A0 = 1 189 × 841 mm
Un cartouche est une zone d'information et un ensemble de données destinées à l'archivage du document. Il est défini par la norme ISO 72001.
Il comporte, entre autres :
- le nom de la pièce et le nom du mécanisme dont elle est issue,
- l'échelle appliquée,
- le nom du dessinateur ou de la société et leurs coordonnées,
- le mode de projection (européen ou américain),
- la date de dernière modification et son indice,
- le format du plan.
Traditionnellement le cartouche est un rectangle placé en bas et à droite de la feuille, celui-ci étant placé verticalement pour les formats « pairs » (A4, A2, A0) et horizontalement pour les autres (autrement dit la dimension multiple de 210 est placée horizontalement). L'origine de cette tradition est liée au rangement des « plans », pliés au format A4 et empilés dans des rayonnages d'armoire. Après pliage, quel que soit le format utilisé, le cartouche apparaissait placé en bas, et permettait d'accéder aux informations directement en soulevant simplement celui qui la recouvrait (placé en haut, pour être lu, il obligerait à tirer tout le document hors de la pile).
Ce type de rangement n'est plus guère pratiqué (car les pliages peuvent la cacher), les grands tiroirs extra-plats, les dossiers suspendus à ouverture latérale ou supérieure, ont vu les cartouches se déplacer en fonction de leur facilité d'accès, et leur place est devenue une « norme maison », selon le type de rangement utilisé dans l'entreprise.
L'apparition de l'ordinateur et du DAO, la quasi-disparition des archives-papier rend le problème de l'accès aux informations très secondaire : l'ordinateur va chercher à la même vitesse le cartouche, fichier parmi les fichiers, où qu'il soit, éventuellement hors du dessin lui-même.
Le texte suit la norme NF E 04-505 ISO3098.
Pour qu'un dessin papier soit lisible assez aisément, des hauteurs de caractères ont été définies comme suit :
- Titre H = 7 mm
- Sous-Titre H = 5 mm
- Texte gros H = 3,5 mm
- Texte normal H = 2,5 mm
H est la hauteur nominale, qui correspond à la hauteur des capitales (entre autres). Cette appellation n'est pas utilisée en typographie et correspond à l'œil plus le jambage ou plus la hampe — en dessin technique, hampe et jambage ont la même taille. L'épaisseur du trait est d'un 10e de la hauteur.
Plan de détail avec vue en coupe à plans parallèles
Pièce réelle coupée illustrant le principe de la représentation
Hachures conventionnelles : tout métal (haut), alliage léger (milieu), alliage de cuivre (bas)
Une vue en coupe permet de faire apparaître certains détails qui seraient sinon cachés à un observateur extérieur. C'est en quelque sorte une vue écorchée. La lecture des traits pleins en est nettement plus aisée. On pratique alors un hachurage des zones où la matière a été tronquée, marquant ainsi un contraste entre les pleins et les creux. Dans un plan d'ensemble, par convention, la pièce centrale (qui n'a rien à cacher) n'est pas coupée.
Pour un dessin de définition, indépendamment du matériau, les hachures, parallèles et régulières, sont en trait continu faisant un angle de 45° ou 30° par rapport aux directions principales de la pièce.
Pour un dessin d'ensemble, les hachures se distinguent par un motif associé à un type de matériaux et plus généralement à une propriété physique ou technique. Sur chaque vue, une même pièce doit avoir le même motif (orientation et fréquence). Il faut alterner si possible l'orientation des hachures entre deux pièces conjointes. On distingue :
- métal ferreux (fer, acier, fonte) ; ces matériaux sont employés pour la majorité des pièces ;
- alliages d'aluminium, dits légers, pour les pièces dont on souhaite minimiser la masse ;
- alliages de cuivre, utilisé pour les pièces de friction ;
- matières plastiques polymère (par exemple joint) : deux réseaux croisés de hachures à trait fin continu faisant 45° l'un par rapport à l'autre ;
- bois ;
- les pièces de petite taille seront parfois grisées, voire noircies quand elles sont vraiment trop petites (contours presque jointifs).
Par convention, on ne coupe jamais les pièces pleines de révolution (arbre, vis, clavette, rivets) ni les nervures : une coupe n'apporte aucune information et alourdit le dessin, donc nuit à sa lisibilité.
Pour simplifier les représentations et alléger le dessin, on utilise des représentations particulières :
- coupe à plans parallèles et coupes à plans sécants : on coupe la pièce selon divers plans afin de montrer tous les détails particulier sur une même vue ;
- demie coupe-demie vue : pour les pièces symétriques, on représente une moitié de la pièce en coupe, et l'autre moitié en vue extérieure ;
- section : on représente une fine tranche de la pièce, on ne voit pas ce qui est derrière le plan de coupe ; ce procédé est en général utilisé pour une pièce ayant un profil continu sur une portion (par exemple rainure de clavette sur un arbre) ; la section peut être représentée à côté du dessin — section sortie — ou bien à l'endroit où l'on effectue la section — section rabattue.
Les principes généraux de la cotation sont définis par la norme ISO 129-1
Le dessin technique se pratique sur des tables munies d'un pantographe : ce dispositif maintient deux règles (disposées à angle droit) dans une direction constante, ce qui aide à la construction des parallèles (correspondance des vues). Sur certaines tables, on peut modifier l'orientation de cette équerre à l'aide d'un vernier, pour l'exécution des hachures par exemple.
Il existe de nombreux logiciels de dessin assisté par ordinateur (DAO) orientés construction mécanique, métallique ou architecture, comme Allplan, ArchiCAD, AutoCAD, GstarCAD, Cadkey etc. Par ailleurs CATIA développé par Dassault Systèmes, est un logiciel pour la conception en 3D et en 2D. Outre l'aide à la gestion informatique (archivage), ils proposent un ensemble d'outils graphiques et des bibliothèques de composants normalisés (vis, roulements…) ou de constructeurs spécifiques (vérins, organes de construction…) permettant un réel gain de temps. L'utilisation de ces logiciels nécessite cependant la connaissance des règles du dessin technique puisqu'ici la souris remplace simplement le crayon, un trait restant un trait.
Les logiciels de conception assistée par ordinateur (CAO) ont ouvert une porte vers la conception intégrée : CATIA, SolidWorks, Autodesk Inventor, Solid Edge, PTC Creo, TopSolid etc. Aussi orientés « métier », ils permettent la création d'objets par assemblage virtuel de 'fonctions' volumiques élémentaires (cylindre, parallélépipède…) ou technologiques (perçages, nervures, plis de tôle…). Ils sont souvent associés à des logiciels annexes permettant la simulation de fonctionnement (TellWATCH [archive] étant la référence horlogère), les calculs par éléments finis (qui permettent de déterminer les endroits de « fatigue » des différentes pièces), les calculs de vérification de comportement ou l'édition d'une image de synthèse en rendu réaliste. L'édition du plan est alors automatique, et les dernières versions permettent déjà, pour des pièces parfois complexes, un plan ne nécessitant aucune retouche.
Sur les autres projets Wikimedia :
- André Chevalier, Guide du dessinateur industriel : pour maîtriser la communication technique, Hachette, , 336 p. (ISBN 978-2-01-168831-6)
- Jean-Louis Fanchon, Guide des sciences et technologies industrielles : dessin industriel et graphes, matériaux, éléments de construction ou de machines..., La Plaine-Saint-Denis/Paris, Afnor/Nathan, , 623 p. (ISBN 978-2-09-161590-5 et 978-2-12-494183-4), p. 5-118
- Portail du génie mécanique
- Portail de la production industrielle
-
Pour les articles homonymes, voir Dessein.
Le dessein intelligent (intelligent design1 en anglais2) est une théorie pseudo-scientifique3,4,5 selon laquelle « certaines observations de l'Univers et du monde du vivant sont mieux expliquées par une cause « intelligente » que par des processus non dirigés tels que la sélection naturelle6. » Cette thèse a été développée par le Discovery Institute, un cercle de réflexion conservateur chrétien américain. Le dessein intelligent est présenté comme une théorie scientifique par ses promoteurs7 mais, dans le monde scientifique, il est considéré comme relevant de la pseudo-science, par des arguments aussi bien internes à la biologie (les promoteurs du dessein intelligent apparaissant aux biologistes comme ne tenant pas compte de nombreuses observations) qu'épistémologiques (en particulier le critère de réfutabilité de Karl Popper).
La plupart des commentateurs et des scientifiques y voient une résurgence du créationnisme8, dissimulée sous une apparence de scientificité ; le biologiste britannique Richard Dawkins le désigne même comme un « créationnisme affublé d'un costume bon marché ». Le dessein intelligent est désormais classé aux États-Unis dans les théories néo-créationnistes, en particulier à la suite de la publication du Wedge document.
Le dessein intelligent ne s'applique qu'au domaine de la biologie, et ne traite pas de l'origine de l'Univers. Ainsi, il ne doit pas être confondu avec le principe anthropique. Les principaux acteurs du mouvement du dessein intelligent acceptent un Univers âgé de plus de 13 milliards d'années9 et la théorie du Big Bang, avec pour opinion personnelle qu'il est causé par le Dieu de la Bible, mais rejettent le mécanisme de mutation aléatoire couplé à une sélection naturelle comme moteur de l'apparition de nouvelles espèces. William Dembski, l'un des principaux fondateurs du concept du dessein intelligent, reconnaît l'existence de preuves solides pointant vers un ancêtre commun à toutes les espèces vivantes et se déclare ouvert à cette idée10, tandis que des publications du Discovery Institute remettent en question ce point ou le rejettent, en usant principalement de l'interprétation créationniste de l'explosion cambrienne11.
Les partisans de l'intelligent design revendiquent une filiation avec les philosophes antiques qui débattaient sur l'argument selon lequel l'ordre et la complexité de la nature indiquent un design, un dessein volontaire. Au ive siècle avant notre ère, Platon suppose dans son œuvre Timée12, que la cause première de l'univers et son créateur sont un bon et sage démiurge13,14. Dans le douzième livre, dit « Lambda » (Λ)15,16, de Métaphysique, Aristote développe l'idée d'une cause motrice immobile. Le dieu aristotélicien est un moteur immobile qui met toute chose en mouvement, il ne crée ni les formes ni la matière. Selon la philosophie stoïcienne, rapportée par Cicéron dans le De Natura Deorum (De la nature des dieux, 45 avant notre ère), « la puissance divine se trouve dans un principe de raison qui imprègne toute la nature17. » Ce type de raisonnement en est venu à être connu comme l'argument théologique de l'existence de Dieu. Certaines de ses formes les plus connues ont été exprimées par Thomas d'Aquin au xiiie siècle, et par le révérend William Paley au xixe siècle. Dans la Summa Theologica, Thomas d'Aquin utilise le concept de design dans sa « cinquième preuve » de l'existence de Dieu18.
Depuis le Moyen Âge, la discussion autour de l'« argument du dessein » et l'« argument téléologique » religieux, avec le concept de « Dessein Intelligent », se réfère continuellement au Dieu Créateur des théistes. Bien qu'ils choisissent ce label provocateur pour leur proposition d'alternative aux explications évolutionnistes, les partisans du Dessein Intelligent ont minimisé leurs antécédents religieux et nié que ce dessein soit de la théologie naturelle ; mais ils présentent encore le Dessein Intelligent comme soutenant les arguments pour l'existence de Dieu.
S'ils ont relevé des exemples passés du mot dessein intelligent qu'ils disent ne pas être créationnistes ni basés sur la foi, ils ont échoué à montrer que ces usages avaient une influence sur ceux qui introduisirent le terme dans le mouvement du dessein intelligent.
Des variations apparurent sur le terme dans des publications du YEC : un livre de 1967 co-écrit par Percival Davis mentionnait un « dessein selon lequel les organismes fondamentaux furent créés ». En 1970, A. E. Wilder-Smith publia La Création de la vie : Une approche cybernétique de l'évolution (en anglais : The Creation of Life: A Cybernetic Approach to Evolution), qui défendait l'argument du dessein de Paley avec des calculs informatiques de l'improbabilité des séquençages génétiques, qu'il disait ne pouvoir être expliqués par l'évolution mais requéraient « la nécessité abhorrée d'activité d'une intelligence divine derrière la nature », et « le même problème pourrait régler la relation entre l'intelligence [designer] derrière la nature et la part de la nature conçue par l'intelligence qu'est l'homme ». Dans un article de 1984 comme dans sa déclaration à Edwards v. Aguillard, Dean H. Kenyon défendit la science créationniste [creation science] en affirmant que « le système biomoléculaire requiert le dessein intelligent et le savoir-faire technique », citant Wilder-Smith. Le créationniste Richard B. Bliss utilisa le terme « dessein créatif » dans Origines : Deux modèles : Évolution, Création (1976), et dans Origines : Création ou Évolution (1988) (en anglais : Origins: Two Models: Evolution, Creation et Origins: Creation or Evolution), écrivit qu'« alors que les évolutionnistes essaient de trouver des manières non-intelligentes de la vie pour se produire, les créationnistes insistent sur le fait qu'un dessein intelligent doit avoir été là en première place. » Le premier usage systématique de ce terme, défini dans un glossaire et revendiqué par d'autres que des créationnistes, remonte à Des pandas et des hommes (Of Pandas and people), co-écrit par Davis et Kenyon.
Le plus grand usage moderne du mot « dessein intelligent », comme un concept voué à décrire un champ d'investigation commença après que la Cour Suprême des États-Unis jugea dans l'affaire Edwards v. Aguillard que le créationnisme était inconstitutionnel dans les programmes scolaires scientifiques publics.
Un rapport de l'Institut de la Découverte (Discovery Institute) dit que Charles B. Thaxton, éditeur de Pandas, avait pris le terme d'un scientifique de la NASA, et pensé « C'est exactement ce dont j'ai besoin, c'est un bon terme technique ». Dans le brouillon du livre, plus d'une centaine d'utilisations du mot « création », comme « créationnisme » et « Science de la Création », furent changées, presque sans exception, en « dessein intelligent », alors que « créationnistes » devenait « partisans du dessein » (en anglais : « design proponents ») ou, en une occurrence, « co-partisans du dessein » (en anglais : « cdesign proponentsists »). En juin 1988, Thaxton tint une conférence intitulée Sources du Contenu de l'information dans l'ADN à Tacoma, État de Washington, et en décembre il décida d'utiliser le label « dessein intelligent » pour son nouveau mouvement créationniste. Stephen C. Meyer était à la conférence, et rappela plus tard que « Le terme dessein intelligent [était arrivé]… »
Des pandas et des hommes fut publié en 1989, et en plus d'inclure tous les arguments actuels pour le dessein intelligent, il fut le premier livre à faire l'usage systématique des termes « dessein intelligent » et « partisans du dessein » aussi bien que du mot « théorie du dessein », définissant le terme dessein intelligent dans un glossaire et le représentant comme n'étant pas créationniste. Si cela représenta le commencement du mouvement du dessein intelligent moderne, « dessein intelligent » fut le plus important d'une quinzaine de nouveaux termes introduits comme un nouveau lexique de la terminologie créationniste pour s'opposer à l'évolution sans recourir au langage religieux. C'était la première fois que le mot « dessein intelligent » apparut dans son usage primitif, comme statué à la fois par son éditeur Jon A. Buell et par William A. Dembsky dans son savant report pour le District scolaire de Kitzmiller v. Dover Area.
Le Centre national pour l'éducation de la science (NCSE, anglais) a critiqué le livre pour car il présente tous les arguments basiques des partisans du dessein intelligent et est promu activement dans les écoles publiques avant qu'aucune recherche ait été faite pour vérifier les arguments. Bien que présenté comme un texte scientifique, le philosophe des sciences Michael Ruse considère le contenu « sans intérêt et déshonorant ». Un avocat de l'Union américaine des libertés civiles le décrit comme un outil politicien destiné aux étudiants qui ne « connaissent [pas] la science ni ne comprennent la dispute autour de l'évolution et du créationnisme ». L'un des auteurs du cadre scientifique utilisé par les écoles de Californie, Kevin Padian, le condamna pour ses « sous-entendus » (sub-text), son « intolérance pour la science honnête » et « compétente ».
Les promoteurs de ce concept, dans le domaine de la biologie et de la biochimie, affirment que la théorie scientifique traditionnelle de l'évolution par voie de sélection naturelle ne suffit pas pour rendre compte de l'origine, de la complexité et de la diversité de la vie. En particulier, les partisans de ce concept estiment qu'il existe des exemples de complexité irréductible qui ne peuvent être expliqués par le darwinisme, et plaident donc pour la théorie du dessein intelligent.
Les principaux membres du Discovery Institute soutiennent que le dessein intelligent est un concept scientifique, matérialiste et testable. Ne faisant pas appel aux dogmes religieux et aux textes saints, rédigées avec un vocabulaire laïc, les publications liées au mouvement tentent de se démarquer de la « science de la création » et même du christianisme19. Rejetant la filiation du concept avec l'argument religieux du dessein formulé par Thomas d'Aquin, ils affirment plutôt que les racines de leur mouvement se retrouvent chez certains penseurs grecs antiques comme Socrate, Platon, Aristote qui pensaient que l'apparition du monde naturel nécessitait un esprit, ou Cicéron qui voyait dans les étoiles et l'adaptation des animaux une preuve d'un design rationnel20. Pour Michael Behe, le dessein intelligent est scientifique parce qu'il se base sur des données matérielles et des inférences logiques21.
Les publications et films vidéos soutenant le dessein intelligent affirment fréquemment que la détection d'un design est intuitive et spontanée, citant notamment la parabole d'une montre découverte sur une plage : le mécanisme d'horlogerie est aisément identifiable comme la fabrication par un être intelligent car trop complexe, et sa présence implique l'existence d'un horloger. Cette analogie de l'horloger est un argument théologique notamment utilisé par le révérend William Paley ; les membres du Discovery Institute affirment s'en distinguer en évitant de supposer que l'« horloger » est le Dieu de la Bible comme le fait Paley. Ils font aussi le parallèle avec le programme Search for Extra-Terrestrial Intelligence (SETI) pour la recherche d'un message produit par une intelligence extraterrestre dans les ondes électromagnétiques émises dans le cosmos, affirmant que des outils mathématiques et scientifiques existent pour détecter un motif créé par un être intelligent22.
Le dessein intelligent ne spécifie pas l'identité du designer, et affirme que sa nature, extraterrestre ou supranaturelle, ne peut être déterminée par une science matérialiste.
Michael Behe est le principal créateur du concept de complexité irréductible, affirmant que certains groupes d'éléments biologiques forment un tout fonctionnel dont il est très improbable qu'il soit le résultat de l'évolution de sous-parties qui le constituent : tous ses éléments doivent être apparus simultanément et correctement reliés pour être fonctionnels. Michael Behe déclare ne pas affirmer l'impossibilité absolue d'une évolution à partir d'éléments ayant une autre fonction, mais seulement la juger très improbable23, et que le dessein intelligent est une explication concurrente et meilleure que le mécanisme darwinien de mutation aléatoire et de sélection naturelle. Michael Behe se focalise sur « les machines moléculaires » infra-cellulaires, et en particulier le flagelle des bactéries. Il affirme ainsi que si une seule protéine constituant ce flagelle est absente, il ne peut fonctionner et la bactérie ne peut se déplacer. Un flagelle amputé et inerte ne présente pour lui aucun avantage pour la survie, et ne peut donc être favorisé par la sélection naturelle. Behe identifie également le système de coagulation sanguine et le système immunitaire comme des exemples de systèmes irréductiblement complexes.
En 1986, le chimiste créationniste Charles Thaxton utilise le terme « specified complexity (en) » tiré de la théorie de l'information, lorsqu'il affirme que les messages transmis dans la cellule par l'ADN sont spécifiés par l'intelligence, et doivent provenir d'un agent intelligent25. Concept essentiellement américain dans le mouvement du dessein intelligent, le terme de specified complexity peut être traduit littéralement par « complexité spécifiée », « spécifique » ou « déterminée ». Quelques documents francophones semblent traduire par « complexité spécifiée » ou « complexité structurée26 ».
Dans les années 1990, le concept est développé par le mathématicien, philosophe et théologien William Dembski, en s'inspirant de la théorie de l'information et de la théorie de la complexité. Dembski affirme qu'un motif à la fois spécifié et complexe est la marque identifiable d'un design par un agent intelligent plutôt que d'être le résultat de processus naturels. Pour Dembski, un motif spécifié est identifié comme nécessitant une description courte, et un motif complexe est celui qui a peu de chance d'apparaitre aléatoirement.
Pour décrire son concept, il donne pour exemple : « une seule lettre de l'alphabet est spécifiée sans être complexe. Une longue phrase faite de lettres aléatoires est complexe sans être spécifiée. Un sonnet de Shakespeare est à la fois complexe et spécifié27. » Il affirme que les détails des êtres vivants peuvent être caractérisés de la même manière, en particulier les « motifs » de séquences moléculaires dans les molécules biologiques fonctionnelles telles que l'ADN.
Dembski définit une information complexe spécifiée (complex specified information ou CSI) comme tout ce qui a moins d'une chance sur 10150 d'apparaitre de façon aléatoire. Certaines critiques se sont élevées pour affirmer que cette définition transforme le concept en argument tautologique : une information complexe spécifiée ne peut apparaître naturellement parce que Dembski l'a défini ainsi, la question réelle devenant alors de savoir si une CSI existe ou non dans la nature28,29,30.
Le concept proposé par Dembski a été largement discrédité par la communauté scientifique et les mathématiciens31,32,33. L'assertion de Demski selon laquelle son concept possède un vaste champ d'applications dans d'autre domaines reste à être démontrée. John Wilkins et Wesley Elsberry décrivent le « filtre explicatif » de Dembski comme éliminatoire, car il élimine les possibles explications de façon séquentielle : d'abord la régularité, puis la chance, et finalement une explication selon le dessein intelligent par défaut. Ils soutiennent que cette procédure est un modèle vicié pour les inférences scientifiques en raison de la façon asymétrique dont il traite les différentes explications possibles, lui donnant une tendance à tirer des conclusions erronées34.
Richard Dawkins, un autre biologiste critique du dessein intelligent, soutient dans son livre Pour en finir avec Dieu que permettre à un designer intelligent d'être responsable pour une complexité improbable repousse seulement le problème, car selon lui, un tel designer devrait être au moins aussi complexe35. D'autres scientifiques ont argumenté que l'évolution par sélection naturelle est plus à même d'expliquer la complexité observée, en raison de l'utilisation de l'évolution par sélection pour créer certains systèmes électroniques, aéronautique ou automatiques qui sont considérés comme trop complexes pour des « designers intelligents » humains36.
L'Académie nationale des sciences des États-Unis et le Centre national pour l'éducation scientifique des États-Unis (National Center for Science Education) ont décrit le dessein intelligent comme étant de la pseudo-science. Les critiques affirment que le dessein intelligent est une tentative pour réexprimer les dogmes religieux sous forme pseudo-scientifique, afin de forcer les institutions scolaires à enseigner la théorie du créationnisme. Le chef astronome du Vatican, le révérend George Coyne, a affirmé que le dessein intelligent « n'est pas de la science, même s'il en a la prétention »37.
Alors que le modèle scientifique de l'évolution est corroboré par des faits observables et reproductibles, comme le principe des mutations, du flux génétique, de la dérive génétique, de la sélection naturelle et de la spéciation, les critiques démontrent que l'hypothèse du dessein intelligent repose sur des éléments qui ne peuvent être reproduits ni observés, et ne répond donc pas au principe de réfutabilité de Karl Popper : une théorie ne peut être qualifiée de scientifique que si elle permet des prédictions pouvant être invalidées par l'expérimentation.
En introduisant une explication externe, le dessein intelligent ne respecte pas non plus un autre principe scientifique, celui du rasoir d'Ockham, car il crée une entité supplémentaire pour expliquer un phénomène sans que cela apporte de lumière supplémentaire en l'état.
L'hypothèse du dessein intelligent ne fournit par ailleurs aucune explication sur les anomalies manifestes de la nature : point aveugle de l'œil humain (et plus généralement des vertébrés), chiasma optique, risque de fausse couche, grossesse extra-utérine, pouce du panda…
Cette hypothèse ne fait pas davantage l'unanimité dans les milieux religieux, les libéraux considérant que la démarche scientifique n'est pas censée être mise sur le même plan que le dogme, et en sens inverse certains dogmatiques considérant qu'une vérité révélée ne requiert pas de preuves d'ordre scientifique.
Enfin, la démarche adoptée par les tenants du dessein intelligent s'oppose à la démarche scientifique en ce qu'ils ne tentent pas de démontrer que leurs arguments sont valables mais demandent à leurs détracteurs de prouver qu'ils ne le sont pas.
Depuis la fin du xxe siècle, le créationnisme littéraliste a été délaissé par certains évangéliques en faveur du dessein intelligent 38.
En 1987, la décision de la Cour suprême des États-Unis dans le cas Edwards v. Aguillard entraîne l'interdiction de l'insertion des « sciences de la création » (creation science) dans le curriculum des écoles publiques, en raison du premier amendement qui empêche tout État américain d'avantager une religion en particulier. Le créationniste américain Charles Thaxton introduit les bases du vocabulaire du dessein intelligent (« intelligent design », « intelligent designer » et « intelligent design proponents ») dans le livre scolaire Of pandas and people. Il stipule que toutes les formes de vies apparaissent soudainement, parfaitement formées, sans formes intermédiaires évolutives, et que cette apparition soudaine est mieux expliquée par l'action d'un designer intelligent, que la science matérialiste est incapable de déterminer. Michael Behe apporte sa caution scientifique au mouvement, et formule le concept de complexité irréductible.
Débarrassé de ses références à la Bible, en particulier la Genèse et le Déluge, le dessein intelligent se veut une apparence scientifique pouvant potentiellement circonvenir la décision de la Cour suprême. Ne spécifiant pas la dénomination du designer et ne reposant pas ouvertement sur la Bible, le dessein intelligent est présenté aux différents mouvement théistes comme une « grande tente » pouvant abriter toutes les affiliations religieuses contre le matérialisme scientifique perçu comme athée.
Le think tank Discovery Institute, établi en 1991 à Seattle, défend cette thèse39.
Les objectifs du dessein intelligent sont définis par le Discovery Institute, dans un document à usage interne The Wedge (« le coin » introduit par les bûcherons dans la coupure d'un arbre pour en écarter les bords). Des fuites permettent finalement sa diffusion en 1999. Les objectifs du Discovery Institute et du dessein intelligent sont de nature politique et religieuse et ont un lien sans équivoque avec le fondamentalisme religieux ; ils se retrouvent de manière chiffrée en termes de retombées médiatiques et législatives avec des délais pour les atteindre40. Les principaux objectifs présentés dans ce document sont de vaincre le matérialisme scientifique et ses héritages moraux, culturels et scientifiques, et de remplacer les explications matérialistes par la compréhension théistique que la nature et l’être humain sont créés par Dieu. Sur cinq ans, la théorie du dessein intelligent doit devenir une alternative acceptée dans les sciences, et des recherches scientifiques menées depuis la perspective de la théorie du dessein. Au terme de ce délai, l’influence de la théorie du dessein doit commencer à atteindre d'autres sphères que la science naturelle, et de nouveaux débats majeurs doivent apparaître dans l’éducation, les sujets relatifs à la vie, la responsabilité pénale et personnelle poussés au front de l’agenda national. Sur vingt ans, la théorie du dessein intelligent doit être perçue comme la perspective dominante dans la science, et entraîner des applications dans des champs spécifiques incluant la biologie moléculaire, la biochimie, la paléontologie, la physique et la cosmologie dans les sciences naturelles ; la psychologie, l’éthique, la politique, la théologie, la philosophie, et les matières littéraires ; voir son influence dans les arts.
Le principe est de faire passer la doctrine religieuse pour une science et de semer la confusion dans les cercles scientifiques, avant de rayonner dans toutes les sphères de la société grâce en particulier à une campagne de publicité et de façonnage d'opinion (« publicity and opinion making »). L'exposition au grand public des visées fondamentalistes du dessein intelligent a porté un coup majeur à ses promoteurs qui, faute de pouvoir nier l'existence du document, en ont proposé une relecture édulcorée sur leur site où le Discovery Institute se défend entre autres de vouloir l'établissement d'une théocratie41.
Le Discovery Institute ne s'adresse que marginalement à la communauté scientifique, et ses publications liées au dessein intelligent dans des revues scientifiques avec évaluation par les pairs sont peu nombreuses. La Foundation for Thought and Ethics (FTE) a fourni une liste des articles liés au mouvement du dessein intelligent publiés dans des revues scientifiques dans l'amicus curiae remis à la cour jugeant l'affaire Kitzmiller v. Dover Area School42. Les quelques articles publiés ont été généralement vivement critiqués par la communauté scientifique ou dans la presse généraliste, parfois suivis d'un désaveu des éditeurs de la publication, ou ne mentionnent pas même le terme de dessein intelligent. L'institut vise essentiellement à communiquer auprès des législateurs, des enseignants de biologie, et des comités élus chapeautant les différents districts scolaires qui fixent le curriculum et l'achat des livres scolaires. L'institut diffuse ainsi des guides pour introduire le dessein intelligent dans l'enseignement, des exemples de textes de lois à voter et rédigés spécifiquement de façon à tenter d'éviter une condamnation en vertu du premier amendement, et des livres ou des récapitulatifs critiquant certains exemples ou concepts de la théorie de l'évolution (Darwin on Trial, Darwin's Black Box ou Icons of Evolution). Les partisans du dessein intelligent jugent en effet la communauté scientifique comme doctrinaire et dogmatique, où la critique du modèle darwinien est impossible. Ils tentent donc plutôt d'influencer l'opinion publique, les élus et les élèves pour créer une controverse publique et obtenir une reconnaissance de leur théorie, qui forceront ensuite la communauté scientifique à reconsidérer sa position.
Le mouvement du dessein intelligent subit une première réorientation dans sa politique, en faisant campagne pour que les écoles « enseignent la controverse » (teach the controversy) : la théorie de l'évolution et le dessein intelligent, puis de laisser les élèves décider par eux-mêmes lequel leur parait le plus convaincant. Les principaux acteurs du mouvement soutiennent ainsi qu'ils favorisent la liberté académique et la réflexion des élèves.
En 2005, le comité du district scolaire de Dover est condamné dans le procès Tammy Kitzmiller, et al. v. Dover Area School District, et al., pour avoir pris des dispositions visant à introduire le dessein intelligent auprès des élèves et en particulier le livre Of pandas and people. Le juge John E. Jones III désigne dans son verdict le dessein intelligent comme n'étant pas de la science, une forme modifiée de créationnisme sous un nouveau label, et déclare qu'il possède une nature religieuse évidente.
En réaction, le Discovery Institute réoriente une nouvelle fois ses campagnes de communication en faveur d'une « analyse critique de la théorie de l'évolution ». Il ne soutient plus l'enseignement du dessein intelligent, il tend plutôt à le décourager pour éviter les problèmes légaux, mais tente d'introduire ses critiques vis-à-vis de l'évolution dans le cours de biologie consacré à cette théorie afin de l'affaiblir dans l'esprit des élèves. Le Discovery Institute communique en particulier sur le phrasé « strengths and weaknesses of evolution », tentant de convaincre les États et les comités scolaires de faire passer des amendements soutenant l'enseignement des « forces et faiblesses de la théorie de l'évolution », ou de développer l'« esprit critique » des élèves sur des sujets jugés controversés en citant généralement la théorie de l'évolution43, le réchauffement climatique et la recherche sur les cellules souches. L'Academic Freedom Act publié par le Discovery Institute a ainsi inspiré plusieurs propositions de lois, comme la loi HB368 votée avec succès par la chambre des représentants du Tennessee en avril 201144,45, plusieurs propositions de lois rejetées au Kentucky, Missouri, Oklahoma, et Nouveau Mexique, et des projets de lois en Floride et au Texas46.
Dans les années 1990 et 2000, à la suite d'un important lobbying et alors que le créationnisme était depuis 1987 retiré officiellement de tous les manuels scolaires après une longue bataille juridique, de nombreux États américains (Pennsylvanie, Kansas, Géorgie, Mississippi, etc.) sont revenus sur la question et ont tenté de faire en sorte que les théories issues du darwinisme soient présentées aux écoliers comme de simples théories concurrentes, mais en rien supérieures, au dogme créationniste, cette démarche a été soutenue notamment par George W. Bush. Certaines de ces démarches ont été renversées au niveau des conseils d'État sur l'éducation.
À Dover, en Pennsylvanie, le bureau de l'éducation locale a décidé en octobre 2004 de dire à tous les élèves de 14 ans que la théorie de l'évolution n'est qu'une simple hypothèse en proposant qu'un texte leur soit lu avant le début du cours de biologie abordant le sujet. Un livre de vulgarisation du dessein intelligent, Of Pandas and People (Des pandas et des Hommes), est même proposé à ceux désirant approfondir la question. Cependant le tribunal fédéral de Harrisburg en Pennsylvanie a conclu le que l'enseignement du dessein intelligent comme une alternative à la théorie de l'évolution de Darwin dans les classes de science des écoles est anticonstitutionnel. Pour rendre ce jugement, le juge John Jones s'est basé sur le fait que le dessein intelligent n'est qu'une forme déguisée de croyance religieuse et l'enseigner enfreint la loi de séparation des cultes et de l'État et va à l'encontre de l'interdiction de promouvoir une religion quelconque dans l'éducation publique aux États-Unis47. Il a été très critique sur le comportement du bureau d'éducation de Dover en déclarant que « les citoyens de la région de Dover sont mal servis par les membres de leur bureau d'éducation ayant voté en faveur du dessein intelligent ». Il a également accusé certains parents du conseil scolaire de Dover d'avoir menti et déclare à ce sujet qu'« il est ironique que plusieurs de ces individus, qui affichent ouvertement et fièrement leurs convictions religieuses en public, aient menti systématiquement pour déguiser leur véritable but. » À la suite de ce jugement, le juge John E. Jones III a reçu plusieurs menaces de mort de tenants du dessein intelligent48.
En Europe, en mai 2005, la ministre néerlandaise de l'éducation, Maria van der Hoeven, a tenu des propos à ce sujet en invoquant elle aussi la théorie du dessein intelligent qui cherche d'abord à établir « scientifiquement » le fait que la nature semble être « pensée » avant de se hasarder à sous-entendre par qui elle l'a été. Cependant, elle n'a pas été suivie par le reste de son gouvernement.
Le dessein intelligent et le créationnisme sont des théories qui connaissent un certain succès auprès des protestants, mais relativement peu auprès des catholiques pour qui l'Ancien Testament ne doit pas se lire au premier degré. D'ailleurs, le pape Jean-Paul II, dans un message prononcé devant l'académie pontificale des Sciences le 22 octobre 1996, admet que « de nouvelles connaissances conduisent à reconnaître dans la théorie de l'évolution plus qu'une hypothèse49 ». Son successeur Benoît XVI affirme que, si la théorie de l'évolution est d'une remarquable efficacité prédictive, elle ne remet pas en cause la foi en un Dieu créateur de l'Univers, et que l'explication de l'émergence biologique de l'homme n'était pas suffisante pour appréhender ce dernier dans sa globalité50.
Le sénateur français Guy Lengagne (PS) a vu son rapport Les dangers du créationnisme dans l'éducation retiré au dernier moment de l'ordre du jour de la réunion du Conseil de l'Europe en juin 2007, sous la pression du parlementaire belge Luc Van den Brande, président du Conseil51. Ses travaux, qui s'inscrivaient dans la continuité de ceux d'Andrew McIntosh, ont finalement fait l'objet d'une résolution intitulée : « Dangers du créationnisme dans l’éducation ». Celle-ci, adoptée le , marque la position du Conseil de l'Europe vis-à-vis du dessein intelligent de la façon suivante :
« Le créationnisme présente de multiples facettes contradictoires. L’intelligent design (dessein intelligent), dernière version plus nuancée du créationnisme, ne nie pas une certaine évolution. Cependant l’intelligent design, présenté de manière plus subtile, voudrait faire passer son approche comme scientifique, et c’est là que réside le danger52. »
Le pastafarisme est une parodie de religion53 créée par Bobby Henderson, pour protester contre la décision du Comité d'Éducation de l'État du Kansas, soutenue par le président des États-Unis George W. Bush et le sénateur Bill Frist54, de permettre au dessein intelligent d'être enseigné dans les cours de science au même titre que la théorie de l'évolution.
- ↑ (en) Leonard Susskind, The Cosmic Landscape : String Theory and the Illusion of Intelligent Design, Little, Brown and Company, , 416 p. (ISBN 978-0-316-01333-8 et 0316013331)
- ↑ La traduction en français de design par dessein est devenue usuelle dans ce cadre. Une traduction par conception serait plus exacte et permettrait de traduire intelligent designer par concepteur intelligent plutôt que par cause intelligente
- ↑ (en) Maarten Boudry, Stefaan Blancke et Johan Braeckman, « Irreducible Incoherence and Intelligent Design: A Look into the Conceptual Toolbox of a Pseudoscience », University of Chicago Press, Chicago, IL, vol. 85, no 4, , p. 473–482 (PMID 21243965, DOI 10.1086/656904) Article available from Universiteit Gent [archive]
- ↑ Pigliucci 2010
- ↑ Young & Edis 2004 pp. 195-196, Section heading: But is it Pseudoscience?
- ↑ Voir site du Discovery Institute, un des promoteurs du dessein intelligent, Questions About Intelligent Design [archive].
- ↑ (en) « Intelligent Design as Science » [archive], sur TalkOrigins (consulté le )
- ↑ (en) « Intelligent Design as creationism » [archive], sur TalkOrigins (consulté le )
- ↑ Voir créationnisme Vieille-Terre.
- ↑ Débat entre le Dr. Genie Scott et Dr. Dembski, série Uncommon Knowledge, épisode Darwin under the Microscope: Questioning Darwinism, KTEH, 12/7/2001. Disponible en ligne [archive].
- ↑ National Geographic Ignores the Flaws IN Darwin's Theory [archive], Jonathan Wells, Discovery Institute, 8 novembre 2004.
- ↑ Brisson 2008, p. 1990.
- ↑ (en) « Plato's Timaeus » [archive], Stanford Encyclopedia of Philosophy, (consulté le )
- ↑ (fr) Timée [archive], Platon, traductions françaises consultables sur Wikisource
- ↑ Pellegrin & Jaulin 2014, p. 1927.
- ↑ (fr) Livre douze de Métaphysique [archive], Platon. Consultable en ligne sur Wikisource.
- ↑ Linda Trinkaus Zagzebski (2006). The Philosophy of Religion: An Historical Introduction, 31; Cicero, De Natura Deorum, Livre I, 36–37, Latin Library [archive].
- ↑ Thomas Aquinas, Summa Theologiae "Thomas Aquinas' 'Five Ways' (archive link)" in faithnet.org.uk.
- ↑ Point 3 et 4 de Top questions [archive], Discovery Institute.
- ↑ Dover In Review point 2.2 [archive], John G. West, Discovery Institute, à partir de l'Amicus curiae de la FTE [archive] remis lors du procès de Dover
- ↑ « it clearly is a scientific theory, because it is based entirely on physical data and logical inferences. » Whether Intelligent Design is Science [archive], Michael Behe.
- ↑ Not by chance: From bacterial propulsion systems to human DNA, evidence of intelligent design is everywhere [archive], Stephen C. Meyer, Dicovery Institute.]
- ↑ Whether Intelligent Design is Science [archive], point 8, Michael Behe
- ↑ William Dembski, Photo par Wesley R. Elsberry, prise lors d'une lecture à l'Université de Californie à Berkeley, 17/03/2006.
- ↑ Stephen C. Meyer, « We Are Not Alone » [archive], Access Research Network, (consulté le )
- ↑ Science et religion : la thèse de l’Intelligent Design [archive], Jean-Marie Blanc, brightsfrance [archive], mars 2006.
- ↑ Dembski. Intelligent Design, p. 47
- ↑ Branden Fitelson, Christopher Stephens et Elliott Sober, How Not to Detect Design : A review of William A. Dembski's The Design Inference—Eliminating Chance Through Small Probabilities, Cambridge University Press, , PDF (lire en ligne [archive])
- ↑ Quelques réponses de Dembski à l'assertion que la CSI est une tautologie sont présentes sur William A. Dembski, « Another way to detect design » [archive], ARN
- ↑ Richard Wein, « Not a Free Lunch But a Box of Chocolates: A critique of William Dembski's book No Free Lunch » [archive],
- ↑ Rich Baldwin, « Information Theory and Creationism » [archive],
- ↑ Mark Perakh, « Dembski 'displaces Darwinism' mathematically -- or does he? » [archive],
- ↑ Jason Rosenhouse, « How Anti-Evolutionists Abuse Mathematics », The Mathematical Intelligencer, vol. 23, no 4, , p. 3–8 (lire en ligne [archive] [PDF])
- ↑ John S. Wilkins, Wesley R. Elsberry, « The Advantages of Theft over Toil: The Design Inference and Arguing from Ignorance », Biology and Philosophy, vol. 16, , p. 711–724 (lire en ligne [archive])
- ↑ Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu, Éditions Perrin, 2009 (ISBN 978-2-262-02986-9).
- ↑ « Evolutionary algorithms now surpass human designers », New Scientist, (lire en ligne [archive])
- ↑ (en) Propos du chef astronome du Vatican sur le dessein Intelligent [archive]
- ↑ Randall Herbert Balmer, Encyclopedia of Evangelicalism: Revised and expanded edition, Baylor University Press, USA, 2004, p. 353
- ↑ Timothy J. Demy Ph.D., Paul R. Shockley Ph.D., Evangelical America: An Encyclopedia of Contemporary American Religious Culture, ABC-CLIO, USA, 2017, p. 224.
- ↑ [PDF] (fr) The Discovery Institute, « The Wedge » [archive] (consulté le ), p. 4
- ↑ (fr) The Discovery Institute, « The “Wedge Document”: “So What?” » [archive], The Discovery Institute (consulté le ).
- ↑ Appendice D de l'Amicus curiae de la FTE [archive]
- ↑ Mathias Girel, « Enseigner la controverse » : retour sur une migration conceptuelle [archive]. Stavo-Debauge, Joan ; Gonzales, Philippe; Frega, Roberto. Quel âge post-séculier?, Editions de l'EHESS, pp. 183-207, 2015 (ISBN 978-2-7132-2483-6).
- ↑ House of Representatives du Tennessee, HB0368 [archive].
- ↑ CBSnews [archive]
- ↑ ‘Critical Thinking’ or Creationism in Tennessee Classrooms? [archive]
- ↑ Ruling, Kitzmiller v. Dover Area School, Cas No. 04cv2688. 20 December 2005
- ↑ « Le juge John E. Jones III menacé de mort par les tenants du dessein intelligent ». [archive]
- ↑ Cédric Grimoult, L'évolution biologique en France : une révolution scientifique, politique et culturelle, Librairie Droz, , p. 216.
- ↑ Ciel & espace, novembre 2006, « Le pape et la science » par Agnès Lenoire.
- ↑ Conférence de presse de Guy Lengagne au sujet de son rapport retiré. [archive]
- ↑ Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, « Dangers du créationnisme dans l’éducation » [archive], sur Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe [archive], .
- ↑ (fr) Guy Lengagne, « Les dangers du créationnisme dans l’éducation » [archive], Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, (consulté le )
Le paragraphe #52 de l'exposé des motifs est consacré au Pastafarisme.
- ↑ (fr) « Bush: Intelligent Design Should Be Taught », Associated Press, (consulté le )
- Pierre Pellegrin (dir.) (trad. du grec ancien), Métaphysique : Aristote, Œuvres complètes, Paris, Éditions Flammarion, , 2923 p. (ISBN 978-2-08-127316-0).
- Luc Brisson (dir.) (trad. du grec ancien), Timée : Platon, Œuvres complètes, Paris, Éditions Flammarion, (1re éd. 2006), 2204 p. (ISBN 978-2-08-121810-9).
- Dialogues sur la religion naturelle, David Hume
- Cyrille Baudouin et Olivier Brosseau, Les Créationnismes, une menace pour la société française ?, Paris, Éditions Syllepse, , 135 p. (ISBN 978-2-84950-167-2, présentation en ligne [archive])
- Rouvière, Jean-Marc (2006), Brèves méditations sur la création du monde, L'Harmattan.
- Gould, S. J. (2000), Et Dieu dit : Que Darwin soit ! : Science et religion, enfin la paix ?, préface de Dominique Lecourt, Éditions du Seuil.
- Lecourt, D. (1992, 3e éd. « Quadrige » 2007), L'Amérique entre la Bible et Darwin : Suivi de Intelligent design : science, morale et politique, PUF.
- Lecourt, D. (dir) (1999, 4e réed. « Quadrige » 2006), Dictionnaire d’histoire et philosophie des sciences, PUF.
- Cyrille Baudouin & Olivier Brosseau, Enquête sur les créationnismes. Réseaux, stratégies et objectifs politiques, Paris, Belin, 2013 / site lié au livre [archive].
- Barbara Forrest, Creationism's Trojan Horse: The Wedge of Intelligent Design (en) (2004)
- Portail des religions et croyances
- Portail du scepticisme rationnel
-
Un dessin d'architecture ou plan de masse est un dessin de tout type et nature, utilisé dans le domaine de l'architecture. C'est généralement une représentation technique d'un bâtiment qui associée à d'autres, permet une compréhension de ses caractéristiques, qu'il soit une construction édifiée ou seulement en projet. Ainsi, divers plans forment le cœur d'un dossier de demande d'un permis de construire.
Un dessin d'architecture est toujours une mise en application de principes géométriques, de considérations esthétiques et d'exigences pratiques ; l'ensemble étant encadré par des conventions. La synthèse et la traduction graphique de tous ces impératifs sont modulées selon le mode de réalisation du dessin, depuis le croquis à main levée jusqu'au système informatique le plus sophistiqué.
Un dessin donné appartient habituellement à un ensemble de dessins concernant un même bâtiment ou projet. Dans le cas d'un projet, il est la concrétisation de l'intention du décideur ultime tout en laissant une part au talent propre de l'architecte1 et même du dessinateur.
Le dessin d'architecture est associé à la carte géographique, à la photographie, à l'écrit sommaire (mémoire), à l'écrit détaillé2 (devis descriptif), aux relevés (état des lieux) faits avec actuellement un outillage informatiquenote 1.
Élévation de la façade d'un palais.
Traceur numérique produisant une image de type Plan de niveau
note 2.
Le dessin a pour rôle de communiquer à la personne concernée un ensemble de caractéristiques très diverses (et dans la plupart des cas sans liaison les unes avec les autres) de ce qui est en projet ou réalisé : la construction d'un bâtiment, d'un monument-sculpture, d'un parc, d'une pièce d'eau, d'un espace scénique… Le plus souvent c'est une sorte de nébuleuse de propriétés essentielles et permanentes attribuées à l'objet fabriqué et le définissant par leur mise ensemble. Il s'agit de traits formulant des formes et des directions, de mots formulant des substances et des qualités, de nombres formulant des tailles et des quantités avec en plus des étiquettes lettres et chiffres de repérage des parties du dessin, l'étiquette du dessin dans l'ensemble projeté.
La précision demandée au dessin (sa finesse des contours, des formes, des traits), son échelle, son support (papier ou numérique), ses cotes intégrées, la symbolique de son graphisme (rien, trait, pointillés, hachures, gris plus ou moins fort, couleur, combinaison des précédents) sont liées au métier de la personne concernée qui doit agir.
L'utilité d'un dessin dépend étroitement du type de personnes qui est amené, professionnellement, à en faire usage. Les priorités qui président à sa conception et sa réalisation ne sont pas les mêmes s'il s'agit d'un urbaniste, d'un organisme d'enregistrement des parcelles bâties par le biais d'un notaire, d'un maître d'ouvrage, maître d'œuvre ou d'un exécutant bâtisseur ou jardinier (artisan ou autre) etc.
Le nombre des intervenants propres à la construction est très variable, même dans les pays très industrialisés3; Selon la technique de l'ingenierie en bureau d'étude présente ou nonnote 3.
Et bien entendu le protocole de construction dépend du pays avec ses normes et ses usages très souvent lié au son climat où se situe la chose dont on parle représentée par des dessins. Les rôles et les métiers des intervenants sont soumises aux lois, donc les droits (propriété5, usage etc.) sont aussi liés aux dessins qui doivent dans les pays occidentaux être archivés (par les concepteurs et par les organismes locaux). Les contrats passés par les intervenants — concepteurs et œuvrants — imposent l'adjonction aux dessins d'écrits détaillés (devis descriptif des objets, matériaux et matières finies obtenus, devis estimatif des coûts préalable)2.
- Types de dessin
- Selon l'objet : construction existante ou projetée ; ampleur de la construction ; degré de détail ;
- Selon sa place dans le projet : dessin d'observation ou esquisse ; document administratif ; représentation technique6 ou esthétique ; dessin d'exécution ;
- Selon la pratique et les conventions :
- Plans : représentations selon une coupe horizontale ;
- Projections, telle que l'élévation, projection sur un plan vertical d'une face de l'objet à représenter : façade principale, façade latérale, etc. ;
- Coupes : tout dessin dans un plan quelconque de l'édifice ;
- Lavis : réalisés en supposant la construction éclairée à 45° verticalement et horizontalement Les dessins ainsi lavés se nomment rendus7.
Vues standards en dessin architectural; élévations façade et pignon, coupe, plan de niveau, axonométrie, isométrie.
Le plan de niveau est le principal dessin d'architecture. C'est une vue de dessus qui représente la disposition des espaces dans un bâtiment, à la manière d'une carte, pour un étage du bâtiment.
Techniquement, c'est une section horizontale d'un bâtiment (conventionnellement à un mètre au-dessus du sol), représentant notamment les murs, les portes et les fenêtres.
À partir du haut Moyen Âge, les circulations — surtout celle des hommes — sont très clairement un objectif architectural depuis la création en Europe du métier d'architecte, celui qui établit la programmation du chantier par le dessin.
Les baies (éclairage du volume créé) étant d'une grande importance, on remarque dans l'architecture classique monumentale les triforiums, les déambulatoires et les coursières et coursives. Il peut donc y avoir les plans de niveau les expliquant.
Il est peu utile de superposer des plans sur des hauteurs différentes à celle de la convention dans l'architecture de type cubique. Le plan de niveau est en général un plan distinct unique par niveau par bâtiment dans le projet.
Il est nécessaire suivant l'époque d'associer les deux : Plan de niveau et Vues en coupe (voir infra); Une architecture dont la conception des volumes évolue avec le temps, des grandes et hautes salles avant le xixe siècle, aux étages du xxe siècle qui reproduisent une répétition des volumes où on les confond avec niveau. Au xxie siècle, l'architecture est devenue quelquefois moins cubique, moins « corbuséenne »note 4.
Une élévation est la représentation d'une façade ; l'élévation ne doit pas être confondue avec la façade. C'est la vue la plus commune pour représenter l'aspect extérieur d'un bâtiment. Chaque élévation est nommée selon la position relative à la façade à rue (avant, gauche, droite ou arrière) ou de la position relative aux points cardinaux.
Avec le système de l'entresol, (entre le sol et le premier étage, issu du fenêtrage avec des croisées), l'élévation montre que l'étage ne se confond pas forcément avec le niveau. Le plan de niveau de l'entresol est alors fourni (on voit actuellement à Hôtel de La Trémoille, côté jardin un entresol). L'entresol s'il est un étage carré mis à disposition au-dessus d'un passage sous le bâtiment peut comporter une cheminée avec âtre.
Les bâtiments n'étant quasi jamais de forme rectangulaire, une élévation typique montre tous les éléments d'un bâtiment visibles dans une direction particulière.
Une élévation peut être intérieure. Elle sera forcément une perspective ou une vue en coupe comportant en fond une élévation. Elle permet de voir les galeries et déambulatoires.
Géométriquement, une élévation est une projection orthogonale horizontale d'un bâtiment sur un plan vertical, le plan vertical étant parallèle à la façade choisie du bâtiment.
Une coupe d'un
Panoptique, au-dessus du plan de panoptique (Illustration de la prison à la façon de
Jeremy Bentham concept du
xviiie siècle).
Une vue en coupe représente un bâtiment coupé par un plan vertical. Dans cette vue, chaque élément coupé par le plan est représenté par une ligne en gras. Les coupes sont notamment utilisées pour décrire les relations entre les différents étages d'un bâtiment.
Géométriquement, une coupe est une projection orthographique horizontale d'un bâtiment sur un plan vertical, le plan vertical coupant le bâtiment. Ce plan peut être représenté projeté sur le plan de niveau par un trait nommé indiquant la direction (exemple: coupe A^___^A').
Lorsque la coupe est significative d'une architecture non répétitive, ce qui est visible sur le plan de niveau ou exprimé sur la coupe (exemple: illustration de gauche), on peut la compléter avec d'autres coupes. Cela a été utile pour exprimer de manière sensible ce qui est technique. Ceci est particulièrement utilenote 5 dans l'architecture n'ayant pas un axe de symétrie telle qu'apparait l'architecture à la fin du xxe siècle utilisant les coupoles et les membres de corps de bâtiment non polygonaux8.
Les vues en coupe fournies par les outils numériques sont particulièrement pertinentes techniquement pour l'architecture d'avant-garde du xxie sièclenote 4.
Axonométrie de corps de bâtiment (architecture
xxe siècle type 1970).
Perspective à la manière de la classique
Cité idéale par
Jean-Max Albert,1977.
Perspective cavalière
xviiie siècle d'une galerie de sape et d'une batterie de canons.
Les projections isométriques et axonométriques sont des façons simples de représenter un objet tridimensionnel, en gardant les éléments à l'échelle, et en montrant les relations entre les différents côtés du même objet. Les vues en perspectives permettent de bien appréhender la complexité d'un objet.
La projection axonométrique est un cas général de projection sans point de fuite (toutes les lignes d'une direction donnée restent parallèles).
La projection isométrique utilise un repère dans lequel les trois directions de l'espace ont la même proportion. Ce mode de projection était le plus utilisé jusqu'au milieu du xxe siècle, et est resté populaire jusqu'aux années 19709,10. Les projections axonométriques sont aujourd'hui remplacés par des vues générés par des outils de CAO à partir d'un modèle tridimensionnel. Il existe différent modes de projection sans point de fuite. Dans chacune de ces projections, la direction verticale est projetée verticalement sur la page : donc aujourd'hui peu utilisés, sauf dans le cas de détails de constructions simples.
La perspective cavalière permet de garder le côté principal sans distorsion, et applique une échelle 0,7 sur la profondeur. Ce mode de perspective a maintenant disparu de l'usage général.
Voir épannelage en ce qui concerne l'urbanisation contemporaine, avec des corps de bâtiments à forme, largeur, hauteur, et longueur de membre imposées au corps de bâtiment.
Un « plan-masse ou plan de masse » est destiné à montrer une vue d'ensemble d'un projet, du dessus, incluant les limites de propriété, les accès, et les structures environnantes si elles ont un intérêt pour le plan. Pour un projet de construction, le plan-masse indique aussi les connexions aux réseaux (eau, électricité, communications...).
Le plan-masse est en général utilisé pour représenter un projet avant le dessin détaillé. Son dessin permet de décider de la configuration du site et de l'orientation des nouveaux bâtiments. Il permet aussi de vérifier qu'un projet respecte les règles d'urbanisme lorsqu'elles existent.
Le dessin en architecture que l'on appelle le plan géométral (abrév. géométral) s'appuie sur la géométrie élémentaire, la géométrie descriptive, la perspective (perspective axonométrique ; perspective isométrique ; perspective cavalière).
- Échelles principales
- Les plans d'ensemble sont dressés à petite échelle : 0,001 (ou 1/1000) 0,002 (ou 1/500) 0,005 (ou 1/200) pour des groupes de bâtiments.
- L'échelle ordinaire d'exécution est de l'ordre de 0,02 (ou 1/50) et adaptée dans le cas de détails.
- Certains objets, certains détails d'exécution, comme un vitrail ou le profil d'une moulure peut être à l'échelle un, grandeur d'exécution.
Différents systèmes de projection
- Projection orthogonale (plan, coupe, élévation)
- Projections axonométrique, oblique et conique
La sensibilité esthétique et l'expérience individuelle s'expriment dans les phases de conception, mais aussi dans la réalisation d'un dessin si celui-ci n'accompagne pas la conception (croquis, esquisse...).
Même s'il s'agit avant tout de traduire des caractéristiques techniques, les compétences graphiques contribuent à la finition ainsi qu'à l'agrément des utilisateurs, sans pour autant laisser place à la fantaisie.
Les compétences d'ordre esthétique sont particulièrement mobilisables dans les représentations du design d'intérieur.
- Qualités graphiques : mise en valeur des structures et reliefs (ombres), de la cohérence du bâtiment ou de son intégration...
- Représentation du design...
- Expression d'un style architectural…
Jusqu'au xxie siècle, l'esthétique des dessins d'architecture hormis la perspective (pour faire la réclame-publicité) n'a jamais été utilisée comme marque de créativité d'artiste. En art contemporain graphique, certains dessins utilisant ces techniques sont totalement détachées des œuvres concernant l'architecture idéale, mais sont de objets de collection, une production de l'imaginationnote 5.
- Conventions de base appelées les normes (DIN, AFNOR, ISA etc.) permettant la compréhension par tous les acteurs et elles sont reportées dans les systèmes d'outils qui aident le dessinateur
- Types de traits, la fonction convenue donnée à leur vue (interprétation concernant l'objet "lu")
- Cotation ; dimensionnement
- mesurage et cotation « kutchs (règles multi-échelle) »
- Symboles
- représentation du mobilier (anciennement sur les « gabarits-pochoirs » et les « transferts » lettres, chiffres, symboles de mobilier standard)
Avant-projet / recherche personnelle
Le dessin à main levée — le croquis — ne s'appuie pas uniquement sur la précision ; il traduit en partie la vision de son auteur et laisse la place à une certaine interprétation1, même si certains éléments peuvent être rigoureusement définis, au besoin au moyen d'annotations.
C'est un outil graphique de communication dont la maîtrise peut s'avérer utile dans toutes les phases de l'évolution du projet d'architecture.
- En phase préliminaire de relevé, c'est l'outil indispensable pour compléter l'observation et la compréhension de la situation existante.
- En phase de recherche, il permet de vérifier rapidement l'impact des diverses manipulations sur la composition de l'espace.
- Lors de la communication avec le client, il permet de restituer par le croquis des informations parfois difficiles à assimiler par le profane, au départ des documents conventionnels en deux dimensions (plans et coupes).
- Lors de la rédaction des documents d'entreprise (cahier spécial des charges, métrés, etc.) c'est un moyen efficace pour permettre aux entrepreneurs de comprendre rapidement l'intention de l'auteur de projet, sans devoir nécessairement décrypter les documents conventionnels en deux dimensions (plans et coupes).
- Lors de la réalisation des ouvrages, sur chantier, c'est un moyen graphique qui permet de matérialiser une situation existante et de rendre évidentes les décisions prises dans le cadre des procès-verbaux de chantier.
Table à dessin d'architecte
Le trait est dessiné au crayon avec la précision requise, puis est encré au tire-lignes pour l'exécution finale.
L'usage du tire-ligne est remplacé par celui du stylo tubulaire à encre de Chine pour lequel, l'épaisseur du trait est réglé de façon unique et définitive par le diamètre de la plume tubulaire qui distribue l'encre sur le support. Il faut donc un stylo par épaisseur de trait (les différentes épaisseurs disponibles sur le marché correspondent aux épaisseurs normalisées)
Le dessin assisté par ordinateur est de plus en plus exploité en architecture depuis les années 1990. Ces logiciels font un grand usage de la modélisation 3D.
En adaptant à l'infini des objets et processus de base, des logiciels spécialisés gèrent toute la chaîne de production graphique et participent dans certains cas au processus de réalisation matérielle.
Ce type d'outil de représentation (DAO) est souvent utilisé comme outil de conception (CAO). Par la mise à disposition d'automatismes d'allocation — qualification des espaces en représentation schématiques ou en représentation perspective, la conception architecturale est facilitée. La formulation ne sort pas alors du champ des possibilités d'accès facile de l'outil commercialisé passé de l'empilement de plans au volumique perceptible et donne incidemment une coloration « numérisé-type » à l'édifice.
Avec le xxie siècle, sont apparus des logiciels facilitant la réalisation de relevé en dimensions « vraies » de bâtiments existantsnote 1.
Historiquement la reproduction de dessins d'architecture classique faits à la main commence à partir de la technique du poncif : on utilise de la poudre passée dans des trous d'aiguille à travers le dessin à reproduire.
Avec l'usage de papier calque dans l'époque moderne, on est passé à la reproduction par une méthode de tirage utilisant la lumière pour reproduire l'original transparent sur du papier-contact photosensible révélé par de la vapeur d'ammoniac donnant un dessin bleu, d'où le nom de « bleu » du tirage, effectué par des sociétés de tirage installées pour permettre la production des dossiers.
Puis maintenant on est arrivé au dessin numérique qui n'est plus un dessin mais une traduction en algèbre matricielle sur support électronique de la géométrie, d'autres éléments (hétérogènes) que la forme y sont référencés (voir supra) — donnant un dessin imprimé un papier par un procédé magnéto-électrique par des tireuses-imprimantes (machines évoluées à partir des photocopieurs) ou par procédé du jet d'encre sur un film pastique ou encore visualisé sur des écrans.
- ↑ Revenir plus haut en :a et b Ces logiciels sont installés sur une base de repérage qui permet leur utilisation au cours du temps pour mesurer les fluctuations dimensionnelles pouvant aboutir très probablement au désordre de la structure porteuse fournissant le volume et/ou de l'aspect du décor.
- ↑ Il s'agit de l'image projetée en plan des traits générateurs d'une enveloppe conique à double courbure inverse. Un traceur fabriqué dans les années 1960 (Georg Nees).
- ↑ En Europe, suivant les missions de responsabilité présentées par les architectes (gradation4: dépôt de permis de construire, étude, mission complète) l'ingénierie est très présente avec l'imbrication de la technique et de l'architecture depuis le xxe siècle (voir Jean Prouvé).
- ↑ Revenir plus haut en :a et b Le déconstructivisme illustré par le Phaeno 2000 de Wolfsbourg en Allemagne, par l'archi. Zaha Hadid utilise les outils numériques pour effectuer les vues en coupe nécessaires à la technique de construction.
- ↑ Revenir plus haut en :a et b
Table traçante « lissant » du sable, œuvre contemporaine dans un musée.
Beyret Nicolas,Démarches d'artistes, démarches d'architectes... Comparaison « La rencontre entre art et architecture dépasse largement la simple confrontation du mur et de la toile. L’évolution de ces deux domaines de la création fait, qu’entre eux, il existe beaucoup plus qu’une relation de lieu. L’art œuvre réputée sans fonction, et l’architecture, par nécessité plus contingente, relèvent aujourd’hui de démarches et de statuts parallèles. Car l’architecture revendique sa voie propre, dans l’autonomie de décisions esthétiques, au-delà du respect des lieux et des fonctions. Tandis que l’art devient de plus en plus sensible aux édifices, villes et territoires qui l’accueillent. Il les intègre ou les transforme, fusion subtile ou provocation radicale qui en modifie la perception et l’identité. »(site [http://w3.toulouse.archi.fr/li2a/amc*/ ENSBAT-amc [archive] consulté le 1/12/2019).
- ↑ Revenir plus haut en :a et b Dessin d'architecture [archive] (site de l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Toulouse mémoires [archive] consulté le 30/11/2019).
- ↑ Revenir plus haut en :a et b M. Manteau et F. Leriche,Cours de métré de bâtiment, tous corps d'état, p. 303.
- ↑ TVA, Contrat avec soi-même et La livraison-à-soi-même LASM (LASM amue [archive] - LASM legifiscal [archive] LASM assistant-juridique [archive] consultés le 1/12/2019).
- ↑ missions d'un architecte en tableau détaillé [archive] (site Ordre des architectes, Belgique -consulté le 1/12/2019)
- ↑ M. Didier,Utilité et valeur de l'information géographique, p. 16.
- ↑ M. Barbier et al. Dictionnaire technique du bâtiment et des travaux publics, p. 16. Pas de définition pour les concepteurs: Plan d'épannelage et Plan masse sont les seuls répertoriés.
- ↑ Denfer, Architecture et constructions civiles, 1893.
- ↑ Exemple: Oscar Niemeyer, Eero Saarinen
- ↑ W. B. McKay, McKay's Building Construction, Donhead Publishing, 2005. (ISBN 978-1-873394-72-4) A new reprint of the combined three volumes that McKay published between 1938 and 1944. Heavily illustrated textbook of architectural detailing.
- ↑ http://www.donhead.com/Look%20Inside/Mckay2.pdf [archive] Sample pages of isometric drawings from McKay's Building Construction.
Sur les autres projets Wikimedia :
- M. Buchotte, Les règles du dessin et du lavis pour les plans particuliers des ouvrages et des bâtiments, C. Jombert, Paris, 1722. [1] [archive]
- M. Buchotte, Les règles du dessin et du lavis pour les plans particuliers des ouvrages et des bâtiments Nouvelle édition, revue, corrigée & augmentée, C. Jombert, Paris, 1754. [2] [archive]
- Jean-Marie Pérouse de Montclos, Architecture méthode et vocabulaire, 6e édition 2007, éditions du Patrimoine, Centre des monuments nationaux.
- Jean de Vigan, Le Petit Dicobat, 3e édition 2005, éditions Arcature.
- M. Didier, Conseil national de l'information géographique, Utilité et valeur de l'information géographique, Paris, Economica, , 255 p. (ISBN 2-7178-1898-7)
- M. Barbier, R. Cadiergues et G. Stoskopf, Dictionnaire technique du bâtiment et des travaux publics, Eyroles, Paris, 7e édition 1979, 151 p.
- M. Manteau et F. Leriche, Cours de métré de bâtiment, tous corps d'état, Eyroles, Paris, 4e édition 1979, 304 p.
- Portail de l’architecture et de l’urbanisme
-
Test sur calque de chef animateur et résultat obtenu.
Réalisé sur différents supports (papier, carton, verre, cello, ordinateur…), un dessin animé est un film d'animation consistant à communiquer aux spectateurs l'illusion du mouvement de personnages ou d'objets en enregistrant image par image une suite de dessins représentant les différentes phases de ce mouvement.
Le terme exclut les animations non dessinées : (animation en papier découpé, en volume (dont pâte à modeler), pixilation). Par métonymie, ce terme désigne aussi les séries d'animation et les films d'animations en tant que tels.
Au Japon, un style particulier de films animés, inspiré des manga, s'est développé et est désigné sous le terme anime.
Le dessin animé est surtout connu pour son succès auprès des enfants, même si une grande part de la production ne s'adresse pas uniquement à eux.
Pauvre Pierrot, premier dessin animé de l'histoire diffusé en public (1892).
Les premiers dessins animés sont les pantomimes lumineuses d'Émile Reynaud. Il les projette pour la première fois le devant un public payant assemblé dans une salle du sous-sol du musée Grévin, à l'aide de son Théâtre optique1 qui utilise une bande continue de 70 mm de large, constituée de carrés de gélatine protégée par de la gomme laque, sur laquelle sont dessinés et coloriés aux encres à l'aniline plusieurs personnages qui font partie d'une dramaturgie complète de 1 minute et demie (plus tard, la durée de ses fictions ira jusqu'à 5 minutes). Ce sont les premières projections sur grand écran (par rétroprojection), trois ans avant celles des frères Lumière et des autres inventeurs européens, qui ne seront organisées qu'à partir de mars 18952,3. La technique utilisée s'appelle aujourd'hui l'animation sans caméra.
Humorous Phases of Funny Faces, réalisé par James Stuart Blackton (1906).
En 1906, James Stuart Blackton réalise le premier dessin animé produit avec une caméra utilisant de la pellicule photographique, dont il modifie le mécanisme pour prendre ce qu'on appellera en France lorsque l'on découvrira le film : « le “ mouvement américain ”. Il était encore inconnu en Europe. »4 C'est Humorous Phases of Funny Faces, c'est-à-dire : Phases amusantes de figures rigolotes, qui dure trois minutes.
Plus tard, le Français Émile Courtet, dit Émile Cohl, reprend la technique de Blackton, dont il semble avoir été le premier à comprendre le mécanisme, et réalise Fantasmagorie (une minute et quarante secondes)3. Il réalise quelque trois cents films, dont une majeure partie de films d'animation. Il exporte son talent aux États-Unis entre 1912 et 1914 dans des studios de Fort Lee, non loin de New-York.
C'est aux États-Unis que la technique du dessin animé va être développée et industrialisée, ce qui explique le nombre importants de termes anglais utilisés dans la profession. Les cartoons des grandes compagnies et les longs métrages des studios de Walt Disney vont contribuer à définir l'esthétique du dessin animé classique.
Ces techniques sont encore utilisées, même si elles sont parfois associées à l'animation informatique, mais elles sont de plus en plus rarement employées, la souplesse de l'animation par ordinateur étant un atout majeur de cet outil, aussi bien sur le plan pratique que sur le plan économique.
Émile Reynaud exécutait un nombre assez faible de dessins qui apparenterait aujourd'hui les pantomimes lumineuses à l'animation limitée. Les dessins animés photographiques des années 1900 à 1930 étaient conçus pour une cadence de prise de vues allant de dix, douze à seize dessins pour chaque seconde de film, en redoublant parfois la prise de vues sur dessins par économie.
L'apparition du film sonore optique au début des années 1930, nécessitant une vitesse de défilement plus importante de la pellicule, porta cette cadence à 24 images par seconde, exigeant 24 dessins différents par seconde, ou la possibilité de doubler la prise de vues de certains dessins, surtout par économie. La télévision nécessite selon les standards de diffusions des différents pays de 30 ou 25 images par seconde, mais les films d'animation prévus exclusivement pour ce média, sont d'abord réalisés à raison de 24 images par seconde (pour une éventuelle présentation en salle de cinéma) avant d'être portés à 30 ou 25 images par seconde. Cette dualité oblige à confectionner deux versions de la bande son pour éviter que le passage à une plus grande cadence n'accélère le son et le pousse ainsi dans les aigus.
Les séries de dessins animés japonais des années 1970, visant le marché mondial de la télévision, sont réalisées à l'économie en triplant parfois la prise de vues sur chaque dessin, ou en utilisant systématiquement les boucles d'animation (reproduction du même mouvement). L'économie de dessins ne signifie pourtant pas nécessairement que le résultat visuel soit de moins bonne facture ; elle part simplement du postulat qu'un mouvement rapide ne demande pas une décomposition similaire à un geste lent et détaillé. Philippe Caza évoque d'ailleurs cette erreur d'appréciation en 1988 à propos des animations « classiques » du film Gandahar réalisé par René Laloux (bénéficiant de 24 dessins réalisés par seconde de film), au rendu « ectoplasmique » (selon les dires du dessinateur), en comparaison des techniques plus modernes du très dynamique Akira sorti la même année mais n'utilisant parfois qu'une quinzaine de dessins par seconde.
Dans les années 2010, le format de la télé numérique s'est standardisé : le ratio de base est le 16:9eme, la cadence image est de 25 images par seconde (en Europe), et le signal entrelacé a fait place à des suites d'images pleines, le mode « progressif ». Ce standard de qualité évite les complications liées aux changements de normes entre les pays. Si un gain de qualité en résulte, cela condamne toutefois nombre de dessins animés réalisés pour la télévision à adopter des bandes noires sur les bords droit et gauche de l'écran, du fait de leur ratio originel en 4:3.
- Le cellulo, feuille souple transparente d'acétate de cellulose, permet de dessiner les personnages sur plusieurs couches et d'éviter de redessiner les parties immobiles du personnage et de limiter l'animation aux autres parties. Par exemple, pour un gros plan, la juxtaposition de la bouche qui mime la parole, dessinée sur un cellulo, des yeux qui clignent sur un autre, et enfin du visage, permet d'économiser la répétition sans intérêt de ce dernier, sauf si la tête doit elle aussi bouger, tourner, hocher, etc.
- Les tenons, dite peg-bar, permettent la juxtaposition exacte des cellulos sur la table lumineuse. Le décor est peint sur papier épais, généralement à la gouache, à l'acrylique ou à l'aquarelle et il est positionné sous l'empilement des cellulos d'animation. Certains éléments du décor pouvant être en mouvement (comme une porte qui s'ouvre), ces éléments ne figurent pas dans le décor arrière, mais sur des cellulos et sont animés image par image comme les personnages.
L'animation est une technique dévoreuse de temps. Pour satisfaire à sa rentabilité, l'équipe d'animation est importante. Le réalisateur, le ou les scénaristes, et le chef animateur déterminent le déroulement de l'histoire par des dessins préparatoires (scénarimage). Les animateurs dessinent, au crayon sur des calques de papier empilables sur des tenons, les instants clés de l'animation d'un plan et décident de la durée du plan, donc du nombre de dessins nécessaires à l'animation. Les intervallistes crayonnent alors chacun des dessins intermédiaires dont ils peuvent tester la validité en les effeuillant selon la technique du folioscope. Ces calques sont ensuite filmés, l'un après l'autre, image par image. Le rendu en projection est alors discuté, des transformations de détail peuvent être proposées. L'animation étant acceptée ou modifiée, une autre équipe reprend chaque dessin sur calque que l'on dispose sous un cellulo et que l'on copie par transparence à l'encre de Chine. Tous les cellulos encrés (généralement en noir) sont alors confiés aux gouachistes (profession identique à celle des coloristes) qui les colorient un par un selon la technique du vitrail, c'est-à-dire en travaillant sur les cellulos disposés à l'envers afin de remplir les couleurs dans les limites du tracé à l'encre noire.
Les empilements de cellulos, séparés l'un de l'autre par des calques neufs, sont ensuite filmés image par image sur un banc spécial de prise de vues, le banc-titre, appelé dans ce cas banc d'animation.
Cycle de vie d'une fleur.
Dans les années 1990, l'informatique a remplacé progressivement les techniques traditionnelles. Si le processus de production reste globalement similaire, les outils ont pour leur part, petit à petit, cédé leur place à des équivalents numériques, permettant une réduction des coûts de production et un allègement du matériel. Les animateurs ont dû néanmoins s'adapter aux nouveaux outils dont la logique et leurs possibilités diffèrent grandement de la technique traditionnelle du dessin animé.
La différence la plus importante réside dans l'avènement de l'animation vectorielle. Outre ses avantages en termes de résolution (un dessin vectoriel peut profiter d'un grossissement infini sans perdre de sa qualité), cette technique autorise la déformation d'un objet et la génération automatique d'étapes d'animation par interpolation entre deux points clés. Elle est très prisée dans les sphères amateurs puisqu'elle autorise des rendus professionnels et des animations complexes sans forcément nécessiter l'intervention d'une grande équipe.
Cette technique suppose qu'entre deux phases du mouvement, l'animateur détermine les positions et l'état (taille, déformation, rotation) de son objet. L'ordinateur calcule ensuite les étapes manquantes, donnant un aperçu rapide de l'animation complète et autorisant par conséquent à un animateur de concevoir seul une animation complexe sans exiger l'aide d’intervallistes. La limite principale de l'interpolation réside dans l'impossibilité pour la machine de se représenter un dessin en tant que volume (il n'est pas question ici d'images de synthèses, mais uniquement d'animation 2D classique, non numérique) ; ainsi la décomposition d'un corps en mouvement et de ses perspectives changeantes doit tout de même nécessiter de la part de l'animateur, la création de nombreuses étapes réalisées à la main. Il peut néanmoins combiner les éléments produits, puis déplacer l'ensemble dans la composition finale plus facilement qu'à l'aide d'une animation traditionnelle, avec un plus grand droit à l'erreur et de meilleures possibilités d'ajustement.
En théorie, cette technique semble prémâcher le travail des animateurs ; en réalité elle ne fait que les assister et les alléger des routines ; elle suppose de leur part, non seulement qu'ils aient connaissance de la palette d'outils que les logiciels leur offrent, mais aussi qu'ils comprennent la logique et les limites de l'interpolation. Par exemple, pour donner du naturel à un mouvement, il faudra peut-être lui appliquer une courbe de Bézier pour déterminer une accélération ou décélération entre les deux point clé plutôt que d'y laisser une cadence linéaire ; il faudra peut-être ajouter un flou de bougé, et surtout il faudra garder à l'esprit qu'un mouvement complexe et trop long ne peut pas être géré correctement sans une grande abondance de points clés (et donc de nombreuses interventions de l'animateur dans le travail de la machine).
Il ne faut pas confondre non plus l'interpolation avec les moteurs physiques propres à l'imagerie de synthèse puisqu'en animation 2D numérique les objets ne se meuvent pas dans un espace soumis à des lois, par exemple, un ballon tombant au sol ne sera perçu par l'ordinateur que comme un rond qui devient un ovale aplati à un moment et sur un point donné de la scène. C'est donc à l'animateur de régler la dynamique de la chute, la compression du ballon sur le sol et son rebond, comme un chef de projet traditionnel déterminant les étapes clés avant le travail des intervallistes.
Les logiciels d'animation 2D numérique contemporains disposent également de paramètres 3D faisant d'eux des logiciels de 2.5D. Il ne s'agit toujours pas de 3D véritable, mais ces principes autorisent tout de même l'utilisation de caméra mobiles dans les scènes (avec détermination de focale et de profondeur de champ) et une mise en espaces des différents éléments constituant la scène. Cela permet une simplification de l'élaboration de parallaxes (déplacement arythmique des avant-plans et arrière-plans) pour dynamiser les scènes sans avoir à créer des déplacements artificiels des calques les uns par rapport aux autres.
Aujourd'hui, la proportion de dessins animés partiellement ou intégralement réalisés par ordinateur, est majoritaire. Suivant la nature de rendu souhaité, et comme nous l'avons expliqué, nombre de dessins animés numériques demandent toujours, contrairement à certaines idées reçues, que les étapes soient majoritairement réalisées par des animateurs plutôt que par interpolation.
L'ordinateur élimine surtout plusieurs restrictions et facilite grandement certaines étapes du développement d'un dessin animé :
- Il n'est plus nécessaire d'encrer et de colorer l'animation sur des cellulos transparents avec de l'encre et de la gouache. Les dessins sur papier peuvent être numérisés et la ligne peut être extraite du dessin en rendant le blanc du papier transparent. Ensuite, les dessins sont colorés numériquement.
- Il est maintenant possible d'avoir une infinité de couches d'animation. Cela était anciennement impossible puisque les cellulos, bien que transparents, devenaient de plus en plus opaques si l'on disposait trop de couches.
- Anciennement, les différentes couches de cellulos étaient assemblés sur un banc-titre et filmées image par image. Si par la suite en visionnant le résultat, il y avait un défaut technique sur une seule image, il fallait reprendre l'ensemble du travail de prise de vues. L'ordinateur facilite grandement cette étape.
Les techniques informatiques modernes permettent d'éviter le coût du développement de la pellicule pour tester l'animation. La vue en pelure d’oignon permet de prévisualiser les étapes pour la correction.
Une infinité d'animatiques peut être réalisée d'après les croquis préparatoires afin de prévisualiser l'animation avant la mise au propre ou bien la version mise au net avant la coloration.
Le travail sur ordinateur peut intervenir à différents niveaux :
- ↑ Bendazzi 2016, p. 16.
- ↑ Sadoul 1968, p. 14-16..
- ↑ Revenir plus haut en :a et b Marie-France Briselance et Jean-Claude Morin, Grammaire du cinéma, Paris, Nouveau Monde, coll. « Cinéma », , 588 p. (ISBN 978-2-84736-458-3), p. 21-23
- ↑ Georges Sadoul, Histoire du cinéma mondial, des origines à nos jours, Paris, Flammarion, , 719 p., p. 407-408
- Georges Sadoul, Histoire du cinéma mondial, des origines à nos jours, Paris, Flammarion, , 719 p., p. 14 à 16
- Dominique Auzel, Émile Reynaud, et l'image s'anima, Dreamland éditeur (ISBN 978-2-910-02737-7)
- (en) Giannalberto Bendazzi (préf. Eric Goldberg, Tom Sito, Maureen Furniss, John Canemaker, Jerzy Kucia, Priit Pärn, Bruno Bozzetto, Yamamura Koji, Michel Ocelot), Animation A World History, vol. I : Foundations — The Golden Age, CRC Press, Focal Press, (ISBN 978-1-138-85452-9) (3 volumes: (ISBN 978-1-138-94307-0))
- (en) Giannalberto Bendazzi, Animation A World History, vol. II : The birth of a style — the three markets, CRC Press, Focal Press, (ISBN 978-1-138-03532-4)
- (en) Giannalberto Bendazzi, Animation A World History, vol. III : Contemporary Times, CRC Press, Focal Press, (ISBN 978-1-138-85482-6, e-ISSN 978-1-315-72074-6[à vérifier : ISSN invalide])
- Olivier Cotte, 100 ans de cinéma d'animation, encyclopédie, Éditions Dunod, (ISBN 9782100741809)
- Xavier Kawa-Topor et Philippe Moins (sous la dir.), Le cinéma d'animation en 100 films Texte imprimé, Capricci, (ISBN 9791023901108, OCLC 1010357950)
- Bernard Lonjon, Emile Reynaud, le véritable inventeur du cinéma, éditions du Roure, (ISBN 978-2-9062-7865-3)
- Borivoj Dovnicovic, La Technique du Dessin Animé, traduction de Petar Magazin [archive], Dreamland éditeur (ISBN 2-9100-2723-6)
- Zoran Perisic, La prise de Vue en Animation, Techniques du banc d'animation, Éditions Dujarric, 1985
- Richard Williams, Techniques d'animation: pour le dessin animé, l'animation 3D et le jeu vidéo, Éditions Eyrolles
- Claude Allard, L'enfant au siècle des images, Albin Michel, 2000
- Geneviève Djénati, Psychanalyse des dessins animés, L'Archipel, 2001
Sur les autres projets Wikimedia :
-
-
Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :