Table des matières :
Préambule : lois physiques relatives à la propulsion
- Mouvement d'un corps dans l'espace.
- Équation de la fusée.
- Delta-v total d'un véhicule spatial.
- Énergie consommée.
- Propulseurs électriques
- Généralités
- Moteurs électrothermiques
- Moteurs électrostatiques - ioniques
- Moteurs électromagnétiques - moteurs à plasma
- Quelle source d'énergie?
- Energie solaire
- Piles à radio-isotopes
- Réacteurs nucléaires
- Autres solutions
- Propulsion Nucléaire
- Propulsion nucléothermique
- Propulsion directe par fission
- Utilisation de la fusion nucléaire
- Principe de base, matériaux fusibles
- Confinement inertiel ou magnétique
- Utilisation en propulsion spatiale
- Propulsion solaire directe
- Voile solaire
- Propulsion solaire-thermique
- Concepts futuristes
- Propulseur à antimatière
- Statoréacteur spatial
- Propulsion assistée par laser
- Propulsion photonique
- Catapultes
- Généralités
- Catapultes chimiques
-Canons
-Catapultes à gaz
-Statocanons
- Catapultes électromagnétiques
-Canon à force de Lorenz
-Driver de masses
-Maglev
Préambule : lois physiques relatives à la propulsion spatiale
- Mouvement d'un corps dans l'espace
L'étude du mouvement d'un corps se fait dans un référentiel choisi. On parle de référentiel galiléen si il est "immobile" ou se déplace à vitesse constante par rapport à... un autre référentiel galiléen. Cette notion est en fait assez arbitraire, et dans l'absolu aucun référentiel galiléen n'existe. Selon le problème, on admet en général comme galiléen le référentiel géocentrique, par exemple.
- Equation de la fusée
Cette équation a été inventée par le Russe Konstantin Tsiolkovsky à la fin du XIXe siècle. Elle exprime la force exercée par un moteur-fusée.
F = (dm/dt) * v. Où F est la poussée obtenue (Newtons), (dm/dt) le débit massique d'ergol (kg.sec-1), v la vitesse d'éjection de l'ergol en m.s-1. Le système formé par l'engin spatial, carburant compris, est, dans le référentiel choisit, isolé, ne recevant aucune force extérieure, ce pourquoi sa quantité de mouvement (produite masse.vitesse) est constante. Chaque seconde, une masse (dm/dt) d'ergols est accélérée à une vitesse v par rapport à l'engin spatial, recevant donc une quantité de mouvement v. (dm/dt). Puisque la quantité de mouvement du système total soit constante, l'engin spatial voit sa propre quantité de mouvement accrue de la même façon (dans le senscontraire).
L'impulsion spécifique (Isp) est le rapport (exrpimé en secondes) du produit poussée-temps de combution sur le masse d'ergols, la poussée étant ici exprimée en kilogramme-poids (1kgp = 9.81 Newtons). De l'équation de la fusée, on déduit que l'impulsion spécifique vaut la vitesse d'éjection divisée par 9.81. Pour un avion, seule l'énergie (fournie par le carburant) est limitée, la masse à éjecter (air) est disponible en abondance.
- Delta-v total d'un véhicule spatial
On note Dv (delta-v) la vitesse que peut prendre un véhicule spatial, intégrale de son accélération. Soit un véhicule spatial de masse M = M1 + M2, M1 étant la masse à vide qui reste après consommation du carburant, M2 la masse de carburant. La variable t est le temps, T la durée de combustion. A l'instant t, la masse du véhicule est donc M-(t/T)M2 = M(t). v est la vitesse d'éjection du fluide, constante. On intègre:
La présence du "-" est due au fait que dm soit négatif. On remarque que delta-v est linéaire à v mais ne dépend pas de T. Il est à noter que le Delta-v ne correspond généralement pas au changement de vitesse effectif. Ainsi, un satellite qui modifie son plan orbital utilise un delta-v assez important mais sa vitesse finale est toujours la même.
- Energie consommée par un propulseur
Un solide de masse m évoluant à la vitesse v dans un référentiel donné possède, par rapport à ce référentiel, une énergie cinétique E donnée par la relation E = 1/2.m.v², où E est en joules, m en kg, et v en m/s. Cette relation devient fausse si v s'approche de c, la vitesse de la lumière dans le vide (3.108 m/s), l'énergie tendant vers l'infini à l'approche de cette vitesse. La consommation en énergie d'un moteur est supérieure à l'énergie qu'il communique au fluide propulsif, le rendement étant au mieux de 70%.
Imaginons ainsi que l'on dispose de 1000 Watts (un watt correspond à une joule par seconde) pour alimenter un propulseur, celui-ci en transmettant 700 au fluide. Si l'on éjecte un gramme de masse par seconde, la vitesse en sortie du moteur sera de 37 000 m/s. L'Impulsion spécifique sera donc de 3780 secondes. La poussée obtenue vaudra 37 Newtons. Si l'on jette 10 grammes par secondes, la vitesse d'éjection sera de 11 800 m/s. L'impulsion spécifique ne sera que de 1200 secondes, mais la poussée atteindra 118 Newtons. En notant M la masse de fluide expulsé par seconde, V la vitesse d'éjection, P la puissance transmise au fluide, F la poussée, on a :
F = V. M
et P = 1/2 * M * V²
d'où V = (2P/M)0,5
Donc : F = (2PM)0,5
La conception d'un propulseur non chimique est toujours la recherche d'un compromis poussée/efficacité. Dans le cas d'un avion, lamasse à éjecter est de l'air, disponible en quantité illimitée, tandis que la source d'énergie est le carburant, rationné. On a donc intérêt, pour valoriser au mieux l'énergie fournie par le carburant, à éjecter une masse plus importante, d'où l'intérêt des réacteur à double flux. Mais pour un engin spatial, aussi bien la source d'énergie que la masse à expulser sont rationnés.
I - Propulseurs électriques
- 1.1 Généralités :
Les technologies de propulsion électriques permettent de construire des moteurs peu puissants mais très efficaces, idéals pour le contrôle d'orbite ou pour la propulsion de croisière des sondes spatiales. Lien sur le site de la NASA. Leur poussée, reportée à leur poids, est faible, mais ils peuvent fournir une impulsion totale plus élevée qu'une propulsion chimique car fonctionnent plus longtemps. Ils sont néanmoins limités en Isp par l'alimentation électrique. C'est en effet un courant électrique qui sert à accélérer un "carburant" (terme impropre ici, puisqu'il n'y a pas de combustion), par différents procédés physiques qui seront détaillés plus loin. Pour une technologie donnée, la puissance électrique nécessaire est donc liée à la poussée demandée.
Les propulseurs électriques ont une Isp optimale. On demande un propulseur électrique capable de délivrer telle poussée pendant telle durée. Si l'on relève l'Isp du moteur, la masse d'ergols nécessaire décroît comme une hyperbole (fonction y=1/x). En revanche, la masse du système d'alimentation électrique (panneaux solaires ou réacteur nucléaire, transformateurs,...) augmente linéairement. La somme des deux, masse du système propulsif, passe donc par un minimum, à une Ips que l'on retiendra pour la mission, permettant la plus forte charge utile. Cette Isp optimale dépend de plusieurs facteurs : le type de propulseur, la durée de fonctionnement (l'Isp optimale sera plus élevée si on demande une poussée plus faible pendant plus longtemps pour une même impulsion, car la courbe de masse d'ergols ne changera pas tandis que celle de la masse du système électrique sera plus basse), le choix du carburant, etc.
Petit à petit, les propulseurs électriques s'imposent sur les satellites et sur les sondes. Deep Space One (USA) est équipée de moteurs ioniques en propulseurs principaux (l'utilisant comme moteurs de manoeuvre est plus ancienne, les Russes s'en sont servi dès les années 60). Ce sera aussi le cas de Bepi Colombo, sonde européenne visant Mercure (qui aura par contre des moteurs chimiques pour l'approche de cette planète). De même, pour certains satellites de télécoms russes, on emploie des moteurs à effet hall pour le contrôle nord-sud et des moteurs chimique pour le contrôle d'altitude, qui réclame plus de poussée.
- 1.2 Moteurs électrothermiques :
Les moteurs électrothermiques utilisent l'électricité pour chauffer un fluide (souvent de l'hydrogène, de l'ammoniac ou de l'hydrazine) qui est chauffé et comprimé, ce qui augmente la vitesse d'éjection. C'est la technologie de propulseur électrique la plus simple et la plus ancienne puisque le premier prototype fut mis au point dans les années 30 par l'équipe de Valentin Glouchko (laboratoire de dynamique des gaz, URSS).
Le resistojet emploie une résistance chauffante que traverse le fluide avant d'être rejeté. L'impulsion spécifique est de l'ordre de 300 secondes, ce qui correspond à un moteur chimique biergol et se situe 30% au-dessus d'un système à jets de gaz froid. Les resistojet sont déjà opérationnels sur des satellites. Il est question d'en employer sur l'ISS (pour les manoeuvres) avec en guide de carburant les déchets de la station.
Les arcjets chauffent le carburant à l'aide d'un arc électrique. Ils ont un rendement (rapport de l'électricité consommée à l'énergie mécanique produite) de l'ordre de 35% et une Isp pouvant atteindre 600 sec.
- 1.3 Moteurs électrostatiques - ioniques :
Cette propulsion fut longtemps du domaine de la science-fiction. Le pionnier Hermann Oberth l'avait déjà imaginée, les recherches sont actives depuis les années 50. Du Xénon, gaz neutre et lourd, ou du mercure est transformé en cations (atomes auxquels il manque des électrons) puis accélérés par un champ électrostatique et rejeté à haute vitesse. Ensuite, le flux d'ions et rejoint par un jet d'électrons qui le neutralise, car le satellite ne peut pas émettre que des charges positives (il ne serait plus électriquement neutre). sur ce principe il existe trois technologies différentes, chacune ayant de nombreuses variantes.
Ces moteurs commencent à être employé sur des sondes (notemment Deep Space 1, USA, et bientôt Smart, europe) et comme moteur de maintien à poste de certains satellites géostationnaires. Comme la propulsion plasmique, permet d'atteindre des Isp de l'ordre de 2500-3000 secondes. Le XIPS américain, déjà en production, éjecte à 30km/secondes avec une Ips de 2600sec. USA, Russie, Europe et Japon planchent sur les moteurs ioniques, qu'ils soient à Xénon ou à mercure. Il est aussi question de projets avec des fullerènes, ou du césium comme ergols.
Les Russes emploient depuis des années des moteurs à effet Hall (une centaine au total), plus puissants mais d'une Isp plus modeste. Ils en étudient de nouveau, d'une Isp de 2500 s et d'une puissance de 4 500 W. alors que les autres moteurs à ions emploient deux grilles, avec entre elles une forte tension, pour accélérer les ions, ces moteurs emploient une chambre de décharge annulaire. Page du JPL sur la propulsion ionique.
A titre historique, il faut citer la mise au point réussie au banc d'essai, dans les années 60, des moteurs colloïdaux : ils reposaient sur le même principe que les moteurs à ions, mais utilisaient des particules beaucoup plus lourdes, telles des gouttelettes d'huiles électrisées. Mais le rapport de la charge sur la masse étant bien moindre pour ces particules, l'impulsion spécifique obtenue était médiocre.
- 1.4 Moteurs électromagnétiques - moteurs à plasma :
Ici le jet propulsif est constitué d'un plasma, c'est-à-dire un mélange d'ions positifs et d'électrons, globalement neutre, accéléré par un champ magnétique.
La compréhension du fonctionnement du moteur magnétosplasmadynamique implique de connaître les deux principes de magnétodynamique explicités dans la partie consacrée au canon à rails. Pour un propulseur électrique, il est assez puissant, puisqu'il peut fournir jusqu'à 200 N de poussée. Il comporte une chambre ouverte, comparable par sa forme à la tuyère d'un moteur-fusée chimique, formant l'anode, et, au centre, d'une cathode cylindrique. Des milliers d'ampères passent entre ces électrodes en traversant le flux d'ergol (de nombreux produits peuvent être employés, à l'exclusion de l'oxygène qui rouillerait l'intérieur, mais l'hydrogène et le lithium offrent les meilleures performances) qui est donc transformé en un plasma. Par ailleurs, le passage du courant dans la structure crée un champ magnétique rotatif comme indiqué sur le schéma. A chaque endroit, le passage du courant et le champ magnétique provoquent une force de Laplace qui tend à expulser le plasma. Le champ magnétique tend aussi à pousser les particules positives vers moyeu cathodique, et les électrons vers l'extérieur, mais le champ électrostatique a l'effet inverse, et, en régime permanent, les deux s'annulent (effet Hall). Ces moteurs ont largement été testés depuis les années 60, en Russie surtout, et quelques-uns ont déjà volé, mais il reste des problèmes notamment pour l'usure de la cathode. L'impulsion spécifique peut atteindre et même dépasser les 10 000 secondes, mais il faut alors beaucoup d'énergie et l'impulsion spécifique idéale est souvent inférieure. Le rendement électricité consommée/travail fourni au fluide propulsif peut atteindre 75%. Ce type de moteurs semble donc plus intéressant encore que leurs cousins ioniques. Si plusieurs sondes russes ont employé de tels moteurs pour le contrôle d'attitude aucun n'a encore servi de mode de propulsion principal sur un engin spatial.
Le moteur plasmique à impulsion (PPT, initiales anglaises) utilise un bloc solide (Téflon par exemple). C'est le plus mature techniquement des moteurs à plasma. A chaque impulsion (1 à 3 fois par seconde), un arc électrique (quelques dizaines de joules stockées auparavant dans un condensateur) arrache la surface du Téflon qui est devient alors un plasma accéléré ensuite par la force de Lorenz jusqu'à 10-20 km/s. Zond 2, sonde martienne russe de 1964, employait un moteur de manoeuvre de ce type. Les USA s'en sont aussi servi sur plusieurs microsatellites. Les PPT intéressent aujourd'hui plusieurs pays comme les USA et l'Argentine. On peut désormais atteindre plus de 1000 secondes d'Isp. Les PPT actuels sont des moteurs de petites taille, d'une poussée moyenne l'ordre du Newton, d'un rapport poussée-poids de l'ordre de 0.02 (un newton pour un moteur de 5 kg), bien adaptés aux manoeuvres de précision ou la propulsion de microsatellites. Il est envisagé de réaliser des PPT au Xénon.
Le PIT (propulseur inductif à impulsions) est un nouveau type de moteur plasmique, qui n'a pas encore volé. Le moteur est entouré d'un cylindre métallique où passe un courant électrique, ce qui génère un champ magnétique. Un gaz est introduit, transformé en plasma par un arc électrique (le principe est assez proche de celui du PPT à gaz) puis accéléré. Ce principe est intéressant mais il faut mettre au point des valves à haute fréquence (plus de 100 ouverture-fermeture par seconde) et longue durée de vie. La haute tension nécessaire demande des transformateurs électrique, ce qui représente un poids supplémentaire.
Parmi les autres concepts de moteurs à plasma, on notera ceux utilisant un faisceau de microondes pour transformer le gaz en plasma.
- 1.5 Quelle source d'énergie?
Quelque soit leurs types, les moteurs électriques requièrent une alimentation ad hoc. Le choix des sources d'électricité possibles dans l'Espace est assez restreint.
Energie solaire
Bepi Colombo aura ainsi besoin de panneaux solaires délivrant 10 kW (6.5 si un moteur à effet Hall est choisi, mais il faudrait alors plus de carburant). Pour les satellites ou les sondes de taille raisonnable, cette solution de propulsion solaire-électrique convient assez bien. Les sondes à propulsion électrique lancées ou en projet (Deep Space One, Smart-1, Bepi-Colombo, etc.) sont toutes de type solaire-électrique. Mais les panneaux solaires ont leurs défauts.
Actuellement, ils ont un rendement de l'ordre de 20% (sur une énergie solaire de 1.4 kW/m² à la distance du soleil où nous sommes), et pèsent 13 kg pour un kW fourni. Cette masse est appelée à diminuer, peut-être d'un facteur 4, par l'augmentation du rendement (on parle de 40%), l'utilisation de matériaux plus légers et l'assemblage en orbite (qui évitera tous les équipement nécessaires aux panneaux déployables). On pourrait aussi utiliser des miroirs (gonflables?) concentrant la lumière sur des panneaux solaires plus petits. Avec les techniques actuelles, l'encombrement et la masse de panneaux solaire fournissant plusieurs mégawatts (par exemple pour une mission habitée vers Mars) semble rédhibitoire.
La puissance solaire disponible est inversement proportionnelle au carré de la distance au soleil, en conséquence les panneaux solaires conviennent bien pour opérer dans la partie intérieure du système solaire mais sont hors jeu pour les planètes géantes, par exemple. En outre les panneaux solaires sont sensibles aux radiations. Ainsi, un engin quittant l'orbite basse traversera les ceinture de radiations de Van Allen, ce qui endommagera les panneaux solaires et réduira leur puissance de 10% au minimum.. Il faut donc surdimensionner les panneaux solaire, ou lancer sur une orbite initiale suffisamment haute pour que l'engin n'ait pas à traverser les ceintures de Von Allen avec les panneaux solaires déployés, ou encore chercher à réduire cette fragilité.
Piles à radio-isotopes
Une alimentation nucléaire présenterait de nombreux avantages. Un réacteur nucléaire offre une puissance massique bien plus élevée que des panneaux solaires. De nombreux satellites ou sondes emploient des générateurs à radio-isotopes (solution aujourd'hui abandonnée pour les satellites, en raison des progrès de l'énergie solaire et des craintes écologiques). Dans ces générateurs, le "carburant" est un matériau radioactif (en général du Pu 238) dont les désintégrations atomiques spontanées (il n'y a pas de réaction en chaîne, la matière fissible étant en quantité subcritique) par dégagement de particules alpha (noyaux d'Hélium 4) créent un échauffement qui procure de l'électricité grâce à des convertisseurs thermoélectriques (des alliages qui ont la propriété de créer une tension lorsqu'on les chauffe en un point et les refroidit en un autre). La source froide est fournie par un radiateur (voir partie sur les réacteurs nucléaires)
La production électrique est relativement modeste (quelques centaines de Watts pour une pile contenant plusieurs kilogrammes de "carburant"), mais la durée de vie peut être très longue (certains sondes américaines telle les voyager alimentées par de tels dispositifs ont été actives plus de vingt ans). Cette technologie, parfaitement maîtrisée aux USA et en Russie, pourrait convenir pour alimenter des sondes équipées de petits moteurs à ions pour un delta-v modeste mais une grande durée de vie. La puissance fournie diminue avec le temps, le métal fissible s'épuisant peu à peu.
Réacteurs nucléaires
Pour des engins nucléoélectriques plus puissants, il faut de vrais réacteurs nucléaires, le schéma ci-dessus représentant un vaisseau nucléaire-électrique. Les Russes, de 1965 à 1988, ont lancé 33 satellites-radar RORSAT dotés d'un petit réacteur nucléaire (baptisé TOPAZ) à uranium. Les USA ont lancé un seul réacteur nucléaire, celui du satellite SNAPSHOT en 1965. Ces réacteurs utilisent des convertisseurs thermoélectriques, comme les générateurs à radio-isotopes, ou des convertisseurs à semi-conducteurs. Pesant un peu plus d'une tonne, les TOPAZ pouvaient fournir environ 5kW pendant plus d'un an. Des radiateurs dispersent de la chaleur dans l'espace, sous forme infrarouge, et se maintienne ainsi à une température relativement basse. Le passage de la chaleur à travers les convertisseur produit de l'électricité. Au plus les radiateurs sont grands, au plus leur température d'équilibre est basse, ce qui augmente le rendement. Dans l'espace lointain, une petite partie de la chaleur pourrait servir à "dégeler" certains sous-systèmes.
Des réacteurs utilisant la même technologie fondamentale que les Topaz, d'une puissance allant de 1 à 100 kW, conviendraient pour des missions robotiques vers les planètes extérieures, les comètes, etc. La plupart des technologies sont déjà maîtrisées : propulsion ionique ou plasmique, réacteur nucléaire (que l'on concevrait sans doute le plus proche possible de ceux employés commercialement, mais plus petit bien sûr), radiateurs légers avec circulation capillaire de fluide colporteur (employés sur certains satellites pour évacuer la chaleur due à l'électronique et/ou au soleil), conversion thermoélectrique, boucliers de protection de la charge utile contre la radioactivité, etc. Le lancement réclamerait des conditions de sécurité particulières, calquées sur celles des vols habités.
Pour des réacteurs plus puissants (à partir de quelques dizaines ou centaines de kilowatts) destinés par exemple à des missions habitées sur Mars ou à des expéditions robotiques de plus grande ampleur, il sera préférable, en termes de poids, d'avoir un système de conversion thermodynamique, c'est-à-dire qu'un fluide colporteur de chaleur (de l'hydrogène liquide, de l'eau, du césium, ou autre) serait chauffé dans le cœur et ferait tourner un système turbo-générateur ou un moteur Stirling, les radiateurs fournissant encore la source froide. On peut envisager des réacteurs à double usage : pour le départ, ils fonctionneraient en circuit ouvert (propulsion nucléothermique) puis basculeraient en circuit fermé (nucléoélectrique).
Pour toute mission utilisant une propulsion électrique, il faut donc choisir entre ces deux types d'alimentations. La propulsion nucléaire-électrique semble s'imposer lorsque la taille du vaisseau et le delta-v, donc la puissance nécessaire, deviennent importants, et lorsque l'on s'éloigne fort du soleil. Il est à noter que les mêmes réacteur pourraient servir à la surface des planètes, pour alimenter un avant-poste robotique (voir habité avec un réacteur plus puissant) sur des planètes, satellites et astéroïde éloignés du soleil.
Autres possibilités
A long terme, sera peut-être disponible l'alimentation à distance par lasers ou micro-ondes, cette possibilité est détaillée en 4.3. Les piles à combustibles (largement employées dans le domaine spatial depuis 40 ans) pourrait éventuellement convenir à de petites sondes auxiliaires (larguées d'une sonde principale) ayant des besoins en énergie faibles et une durée de vie très courte. Elles ont déjà été employées sur de nombreux engins spatiaux, depuis les capsules Gemini. Quant à l'alimentation par fusion nucléaire, elle ne sera pas disponible avant au moins un demi-siècle.